Page:Gobineau - Nouvelles asiatiques 1876.djvu/119

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Il prononça ces mots avec une expression si méprisante et qui ressemblait si fort à une invective, que Mirza-Kassem en fut de plus en plus troublé. Mais le derviche n’y prit pas garde et lui dit :

— Faites-moi donner un morceau de plomb ou de fer.

On apporta une douzaine de balles de fusil ; il les mit sur les charbons, et elles commencèrent bientôt à entrer en fusion, d’autant plus qu’il activait le feu avec son souffle. Puis il prit, dans la ceinture de coton noir qui soutenait son pantalon, une petite boîte d’étain, où Mirza-Kassem aperçut de la poudre rouge. Le derviche en prit une pincée et la jeta sur le plomb ; peu d’instants étaient écoulés que, se penchant, il dit d’une voix calme :

— C’est fait !

Et il mit sur le sopha, devant Mirza-Kassem, un lingot d’un jaune pâle, que celui-ci reconnut immédiatement pour être de l’or.

— Et voilà ! s’écria le derviche d’un air de triomphe, ce que je peux sur les hommes ! Est-ce assez ! Ai-je besoin de splendeurs, de magnificences, de luxe, d’insolence ! Et vous, mon fils, apprenez désormais à savoir que la puissance n’est pas dans ce qui s’affiche, mais uniquement dans l’autorité des âmes fortes, ce que le vulgaire ne croit pas !

— Hélas ! mon père, répondit Mirza-Kassem d’une voix tremblante d’émotion, il ne suffit même pas que