Page:Gobineau - Nouvelles asiatiques 1876.djvu/125

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désirez, je le pèserai exactement, et vous remettrai le prix avec déduction d’un très-petit bénéfice.

— Je vous remercie, répondit Kassem, mais, pour le moment, rien ne me presse de me séparer de cet objet, et j’aurai recours à vous, en temps et lieu.

— Quand il vous plaira, répartit le marchand.

Il salua Kassem, qui prit congé et sortit.

Il s’en alla à travers les bazars, frôlant les boutiques ; mais les apostrophes enjouées des femmes qui, sous le voile, se permettent tout (on ne le sait que trop), les appels et les compliments de ses connaissances, les avertissements brusques des muletiers et des chameliers, pour qu’il eût à faire place à leurs bêtes, qui se succédaient en files interminables attachées à la queue les unes des autres et chargées de ballots dont il fallait craindre le contact pour chacun de ses membres, tout cela, qui l’amusait d’ordinaire, le fatiguait jusqu’à l’irriter aujourd’hui. Il avait un besoin impérieux d’être seul, livré à ce monde de pensées qui le tyrannisaient et le voulaient posséder sans conteste. Il sortit de la ville, et ayant atteint dans le désert un endroit où s’élevait un groupe de grands tombeaux en ruines, il entra sous une des coupoles à moitié effondrées et se mit dans un coin, à l’ombre. Là, s’étant assis, il s’abandonna aux idées dominatrices qui fondaient sur lui comme un essaim d’oiseaux de proie.

Il existe, dans toutes les rues de nos villes de l’Iran,