Page:Gobineau - Nouvelles asiatiques 1876.djvu/213

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Kérym tomba baigné dans son sang. Quelques minutes plus tard, il expirait.

L’innocent meurtrier, au désespoir, perdait complètement la tête ; les autres ferrashs, témoins de l’action et sûrs de ce qu’elle avait d’involontaire, s’empressèrent de le mettre à l’abri des dangers du premier moment. Ils le poussèrent dans l’écurie, et, tout courant, Gambèr-Aly s’en alla tomber contre la jambe droite du cheval favori de Son Altesse, bien décidé à ne plus sortir de cet asile inviolable pendant le reste de ses jours.

Au bout de deux heures, cependant, il était un peu calmé. Le sous-aide de cuisine lui avait confié, sous le sceau du plus grand secret, que le frère du mort avec deux cousins était venu au Palais. Ils avaient parlé au ferrash-bachi, et celui-ci, devant tout le monde, leur avait demandé comment ils entendaient faire valoir leurs droits. Ils avaient répondu qu’on leur donnerait le meurtrier pour qu’ils en fissent à leur guise ou bien 50 tomans. — 50 tomans ! avait répondu le ferrash-bachi d’un ton méprisant, 50 tomans pour le plus mauvais de mes hommes, qui serait mort de lui-même avant un mois ! Que votre bonté ne diminue pas ! Vous vous moquez du monde ! Si vous voulez 10 tomans, je les donnerai moi-même, pour qu’on ne fasse pas de peine à mon pauvre Gambèr-Aly.

Voilà ce que vint raconter le marmiton Kassem, et Gambèr-Aly se réjouit de tout son cœur de la tournure