Page:Gobineau - Nouvelles asiatiques 1876.djvu/343

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Il n’aperçut rien. Le jour grandissait rapidement. Sur l’horizon bleu se découpaient, comme une silhouette dorée et verte, les terrasses de quelques maisons et plusieurs arbres touffus, ornements des cours voisines. Il se coucha par terre, afin d’être mieux caché et pendant assez longtemps, peut-être pendant une heure, resta ainsi, entouré d’un calme absolu. À la fin, il entendit distinctement des pas assez nombreux. Il prêta l’oreille et saisit des chuchottements.

— Les voici ! pensa-t-il rapidement. Rien qui ressemblât à de la peur ne toucha son courage, dur comme l’acier.

Il se releva sur un genou et tira son long couteau qu’il assura fortement dans sa main, et, à peine était-il ainsi préparé, un homme franchit le mur derrière lequel il se tenait. C’était le nayb d’Osman-Beg. Il servait de guide à l’ennemi. Mohsèn se releva brusquement et presque avant que le nayb l’eût même aperçu, il porta à celui-ci un coup furieux sur la tête, fendit son turban de toile bleu-clair rayé de rouge et l’étendit mort sur la place, puis se jeta sur un autre assaillant qui parut à côté du nayb : c’était un de ses cousins, l’aîné : il l’abattit d’un vigoureux coup de taille et aborda son oncle lui-même. Celui-ci n’eut que le temps tout juste de parer du sabre ; alors, le plus inégal de tous les combats commença entre Mohsèn et la bande qui le poursuivait. Mais, sans le savoir, il avait deux avantages sur ses