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ses autorisations, que la nature l’était dans les siennes. Ce n’est pas tout. Contre les graves témoignages qu’invoque M. Prichard, il en est d’autres plus concluants, quoique plus légers, et qui tranchent la question en faveur de mon opinion.

Les poètes, attachés seulement, dans leurs récits d’amour, à montrer leurs héroïnes à la fleur de leur beauté, sans se soucier du développement moral, les poètes orientaux ont toujours fait leurs amantes bien plus jeunes que l’âge indiqué par le Coran. Zélika Leïla n’ont certes pas quatorze ans. Dans l’Inde, la différence est plus marquée encore. Sakontala serait en Europe une toute jeune fille, une enfant. Le bel âge de l’amour pour une femme de ce pays-là, c’est de neuf à douze ans. Voilà donc une opinion très générale, bien établie, bien admise dans les races indiennes, persanes et arabes, que le printemps de la vie, chez les femmes, éclôt à une époque un peu précoce pour nous. Longtemps nos écrivains ont pris l’avis, en cette matière, des anciens modèles de Rome. Ceux-ci, d’accord avec leurs instituteurs de la Grèce, acceptaient quinze ans pour le bel âge. Depuis que les idées du Nord (1)[1] ont influé sur notre littérature, nous n’avons plus vu dans les romans que des adolescentes de dix-huit ans, et même au delà.

Si, maintenant, on retourne à des arguments moins gais, on ne les trouvera pas en moindre abondance. Outre ce qui a déjà été dit, plus haut, sur les Juifs allemands, on pourra relever que, dans plusieurs parties de la Suisse, le développement physique de la population est tellement tardif, que, pour les hommes, il n’est pas toujours achevé à la vingtième année. Une autre série d’observations, très facile à aborder, serait offerte

  1. (1) Il faut faire exception pour Shakespeare, composant sur des canevas italiens. Ainsi, dans Roméo et Juliette, voici comment parle Capulet :

    My child is yet a stranger in the world,
    She hath not seen the change of fourteen years,
    Let two more summers wither in their pride,
    Ere we may think her ripe to be a bride.

    Ce à quoi Paris répond :

    Younger than she are happy mothers made.