Page:Gobineau Essai inegalite races 1884 Vol 2.djvu/13

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bien ici la déviation de la source pure, d’où Prométhée était issu. Si Deucalion devient éponyme de ses descendants, c’est qu’il n’a pas la même composition, la même signification ethnique que son père. Rien de plus évident. Cependant les apports de sang sémitique ou aborigène ne peuvent constituer son originalité : c’est bien dès lors dans la ligne paternelle qu’il faut la chercher, sans quoi Deucalion ne serait nullement considéré par la légende hellénique comme l’homme type, et, dans les récits grecs d’origine sémitique, il serait classé bien après les héros chananéens qui l’ont, en effet, précédé suivant l’ordre des temps. Deucalion tire donc tout son mérite spécial de son père, et ainsi c’est la race de celui-ci qu’il importe de reconnaître. Or, Prométhée était un Titan, ainsi que son frère Épiméthée, d’où les Arians Hellènes descendent également par les femmes. En conséquence, personne, je crois, ne pourra combattre cette conclusion : les Arians Hellènes avant Deucalion, les Arians Hellènes, encore à peu près intacts de tous mélanges soit sémitiques, soit aborigènes, ce sont les Titans (1)[1]. La régularité de la filiation ne laisse rien à désirer.

Jusque-là, il est établi d’une manière irréfragable que les Grecs sont des descendants métis de cette nation glorieuse et terrible. Pourtant on pourrait douter encore que les Titans aient été, eux-mêmes, ces Hellènes, séparés jadis de la famille ariane sur les versants de l’Imaüs, et dont nous avons senti, plutôt que vu, la longue pérégrination dans les montagnes du nord de l’Assyrie, au long de la mer Caspienne. À la vérité, si la généalogie ascendante des Titans était complètement perdue, le fait n’en serait pas moins établi, avec toute la certitude



(1) Hésiode dérive le mot Τίταν, de τιταίνω, οἱ τεἱνοντες τὰς χεῖρας, ceux qui étendent les mains. On donna à cette signification la portée de βασιλεὺς, et on fit de ceux à qui on l’avait attribuée les Rois par excellence. De même les Arians zoroastriens appelaient leurs ancêtres, probablement contemporains et frères des Titans, Kaï, ou Kava, les Rois. Le Pseudo-Orphée et Diodore représentent les Titans comme les premiers des humains, les hommes types. (Diodore, III, 57 ; V, 66.) — Le dialecte thessalien avait conservé fidèlement la trace de l’idée ancienne, et Τίταν y désignait le seigneur, le chef. (Voir Bœttiger, Ideen zur Kunstmythologie (Dresde, in-8o, 1826), t. II, p. 47 et passim.)

  1. (1) Hésiode dérive le mot Τίταν, de τιταίνω, οἱ τεἱνοντες τὰς χεῖρας, ceux qui étendent les mains. On donna à cette signification la portée de βασιλεὺς, et on fit de ceux à qui on l’avait attribuée les Rois par excellence. De même les Arians zoroastriens appelaient leurs ancêtres, probablement contemporains et frères des Titans, Kaï, ou Kava, les Rois. Le Pseudo-Orphée et Diodore représentent les Titans comme les premiers des humains, les hommes types. (Diodore, III, 57 ; V, 66.) — Le dialecte thessalien avait conservé fidèlement la trace de l’idée ancienne, et Τίταν y désignait le seigneur, le chef. (Voir Bœttiger, Ideen zur Kunstmythologie (Dresde, in-8o, 1826), t. II, p. 47 et passim.)