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mot emporte avec lui les deux idées de noblesse et de possession si intimement combinées, que l’on est fort embarrassé de découvrir si l’homme était propriétaire parce qu’il était noble, ou l’inverse (1[1]). Mais il est peu douteux que l’organisation primordiale, ne reconnaissant pour homme véritable que l’Arian, ne voyait aussi de propriété régulière et légale qu’entre ses mains et n’imaginait pas d’Arian privé de cet avantage.

L’odel appartenait sans restriction aucune à son maître. Ni la communauté ni le magistrat n’avaient qualité pour exercer sur cette sorte de possession la revendication la plus légère, le droit le plus minime. L’odel était absolument libre de toute charge ; il ne payait pas d’impôts. Il constituait une véritable souveraineté, souveraineté inconnue aujourd’hui, où la nue propriété, l’usufruit et le haut domaine se confondaient absolument. Le sacerdoce en était inséparable, et inséparable aussi la juridiction à tous ses degrés, au civil comme au criminel. L’Arian Germain siégeait à son foyer, disposait à son gré de la terre allodiale et de tout ce qui l’habitait. Femmes, enfants, serviteurs, esclaves, ne reconnaissaient que lui, ne vivaient que par lui, ne rendaient compte qu’à lui seul, qui ne rendait compte à personne. Soit qu’il eût construit sa demeure et mis ses champs en culture sur un terrain désert, soit que ses propres forces lui eussent suffi pour en dépouiller le Finnois, le Slave, le Celte ou le Jotun, tous gens placés nativement hors la loi, ses prérogatives ne rencontraient pas de limites.

Il n’en était pas tout à fait de même lorsque, en société avec d’autres Arians, agissant sous la direction commune d’un chef de guerre, il se trouvait être participant à la conquête d’un territoire dont une portion, grande ou petite, lui avait été adjugée. Cette autre situation créait un autre système de tenure


Dieffenbach, Vergleichendes Wœrterbuch der gothischen Sprache, 1. 1, p. 56.

(1) Chez les Anglo-Saxons il arriva même que la perte de l’odel entraînait celle des droits politiques, et par conséquent de la qualité d’homme libre. (Kemble, t. I, p. 70-71 et seqq.) On peut voir, du reste, avec toute raison, dans cette union étroite de la qualité légale d’Arian avec celle de propriétaire, à quel point les instincts de la race étaient éloignés des dispositions à la vie nomade.


  1. (1) Chez les Anglo-Saxons il arriva même que la perte de l’odel entraînait celle des droits politiques, et par conséquent de la qualité d’homme libre. (Kemble, t. I, p. 70-71 et seqq.) On peut voir, du reste, avec toute raison, dans cette union étroite de la qualité légale d’Arian avec celle de propriétaire, à quel point les instincts de la race étaient éloignés des dispositions à la vie nomade.