Page:Gobineau Essai inegalite races 1884 Vol 2.djvu/430

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des bénéfices réversibles en vertu de principes germaniques et de principes romains, ce qu’on appelait et ce qu’on appelle encore des féods  ; ou même il constituait à son gré des terres allodiales, avec cette différence fondamentale, cependant, qui distinguait complètement ces concessions des odels anciens, que c’était la volonté royale qui les faisait, et non pas l’action libre du propriétaire (1)[1]. Quoi qu’il en soit, féod ou odel, le chef qui les donnait à ses hommes avait sur la province le droit de propriété, ou plutôt de libre disposition, comme délégué de l’empereur, mais point le haut domaine.

Telle était la situation des Mérowings dans les Gaules. Lorsqu’un d’eux était à son lit de mort, il ne pouvait lui venir en idée de donner des provinces à son fils, puisqu’il n’en possédait pas lui-même. Il établissait donc la répartition de son héritage sur des principes tout autres. En tant que chef germanique, il ne disposait que du commandement d’un nombre plus ou moins considérable de guerriers, et de certaines propriétés rurales qui lui servaient à entretenir cette armée. C’étaient cette bande et ces domaines qui lui donnaient la qualité de roi, et il ne l’avait pas d’ailleurs. En tant que magistrat romain, il n’avait que le produit des impôts perçus dans les différentes parties de sa juridiction, d’après les données du cadastre impérial.

En face de cette situation, et voulant égaliser de son mieux les parts de ses enfants, le testateur assignait à chacun d’eux une résidence entourée d’hommes de guerre appartenant, autant que possible, à une même tribu. C’était là le domaine germanique, et il eût suffi d’une métairie et d’une vingtaine de champions pour autoriser le jeune Mérowing qui n’eût pas obtenu davantage à porter le titre de roi.

(1) Ce fut probablement comme une conséquence de l’importation des alleux que certains possesseurs de terres furent exemptés par les rois du pouvoir des comtes. C’était un souvenir de l’ancienne liberté de l’Arian dans son odel. Mais cette immunité n’était jamais complète, et le possesseur de l’alleu fut toujours responsable devant le tribunal commun, devant le comte, des crimes de meurtre, de rapt et d’incendie. (Savigny, Das Rœm. Recht im Mittelalt., t. I, p. 278.)


  1. (1) Ce fut probablement comme une conséquence de l’importation des alleux que certains possesseurs de terres furent exemptés par les rois du pouvoir des comtes. C’était un souvenir de l’ancienne liberté de l’Arian dans son odel. Mais cette immunité n’était jamais complète, et le possesseur de l’alleu fut toujours responsable devant le tribunal commun, devant le comte, des crimes de meurtre, de rapt et d’incendie. (Savigny, Das Rœm. Recht im Mittelalt., t. I, p. 278.)