Page:Gobineau Essai inegalite races 1884 Vol 2.djvu/441

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rocher, et lui survivre. Les nations germaniques ne pouvaient éviter de se dissoudre un jour dans les détritus accumulés et puissants des races qui les entouraient, et leur énergie était condamnée à s’y éteindre. Voilà ce qui était la vérité ; voilà ce que l’instinct révélait aux populations romaines. Seulement, je le répète, cette révolution devait s’opérer avec une lenteur dont les imaginations humaines n’aiment pas à mesurer les ennuis, vu la difficulté qu’elles éprouvent d’ailleurs à se soutenir au milieu d’espaces un peu larges. Il faut ajouter encore qu’elle ne pouvait jamais être si radicale que de ramener la société à son point de départ sémitisé. Les éléments germaniques devaient s’absorber, mais non pas disparaître à ce point.

Ils s’absorbent néanmoins, et d’une façon constante désormais. Leur décomposition au sein des autres éléments ethniques est bien facile à suivre. Elle fournit la raison d’être de tous les mouvements importants des sociétés modernes, ainsi qu’on en juge aisément en examinant les différents ordres de faits qui lui servent à se manifester.

Il a déjà été établi précédemment que toute société se fondait sur trois classes primitives, représentant chacune une variété ethnique : la noblesse, image plus ou moins ressemblante de la race victorieuse  ; la bourgeoisie, composée de métis rapprochés de la grande race  ; le peuple, esclave, ou du moins fort déprimé, comme appartenant à une variété humaine inférieure, nègre dans le sud, finnoise dans le nord.

Ces notions radicales furent brouillées partout de très bonne heure. Bientôt on connut plus de trois catégories ethniques ; partant, beaucoup plus de trois subdivisions sociales. Cependant l’esprit qui avait fondé cette organisation est toujours resté vivant ; il l’est encore ; il ne s’est jamais donné de démenti à lui-même, et il se montre aujourd’hui aussi sévèrement logique que jamais.

Du moment que les supériorités ethniques disparaissent, cet esprit ne tolère pas longtemps l’existence des institutions faites pour elles et qui leur survivent. Il n’admet pas la fiction. Il abroge d’abord le nom national des vainqueurs, et fait dominer celui des vaincus ; puis il met à néant la puissance aristocratique