Page:Gobineau Essai inegalite races 1884 Vol 2.djvu/510

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plus bruns, le nez prend la forme aquiline, et souvent d’une façon très accentuée ; les yeux deviennent droits, ou presque droits ; quelquefois la mâchoire se développe en avant : de tels cas sont rares. Le front cesse d’être bombé et affecte la forme fuyante. Tous ces indices réunis dénoncent la présence de l’immixtion noire dans un fond mongol. Ainsi l’ensemble des groupes aborigènes du continent américain forme un réseau de nations malaises, en tant que ce mot peut s’appliquer ides produits très différemment gradués du mélange finno- mélanien, ce que personne ne conteste d’ailleurs pour toutes les familles qui s’étendent de Madagascar aux Marquises, et de la Chine à l’île de Pâques.

S’enquiert-on maintenant par quels moyens la communication entre les deux grands types noir et jaune a pu s’établir dans l’est de l’hémisphère austral ? Il est aisé, très aisé de tranquilliser l’esprit à cet égard. Entre Madagascar et la première île malaise, qui est Ceylan, il y a 12° au moins, tandis que du Japon au Kamtschatka et de la côte d’Asie à celle d’Amérique, par le détroit de Behring, la distance est insignifiante. On n’a pas oublié que, dans une autre partie de cet ouvrage, l’existence de tribus noires sur les îles au nord de Niphon a déjà été signalée pour une époque très moderne. D’autre part, puisqu’il a été possible à des peuples malais de passer d’archipels en archipels jusqu’à l’île de Pâques, il n’y a nulle difficulté à ce que, parvenus à ce point, ils aient continué jusqu’à la côte du Chili, située vis-à-vis d’eux, et y soient arrivés, après une traversée rendue assez facile par les îles semées sur la route, Sala, Saint-Ambroise, Juan-Fernandez, circonstance qui réduit à deux cents lieues le plus court trajet d’un des points intermédiaires à l’autre. Or, on a vu que des hasards de mer entraînaient fréquemment des embarcations d’indigènes à plus du double de cette distance. L’Amérique était donc accessible, du côté de l’ouest, par ses deux extrémités nord et sud. Il est encore d’autres motifs pour ne pas douter que ce qui était matériellement possible a eu lieu en effet (1)[1].

(1) Morton conteste la possibilité de l’arrivée de groupes malais jus


  1. (1) Morton conteste la possibilité de l’arrivée de groupes malais jusqu’à la côte d’Amérique, parce que, dit-il, les vents d’est règnent le plus ordinairement dans ces parages. (Ouvr. cité, p. 32.) En se prononçant ainsi, il oublie le fait incontestable de la colonisation de toutes les îles du Pacifique par une même race venue de l’ouest, et cette circonstance plus particulière, que lui-même signale (p. 17), qu’en 1833, une jonque japonaise a été jetée par les vents sur cette même côte d’Amérique qu’il déclare, un peu plus bas, inaccessible de ce côté. Il a vu lui-même des vases de porcelaine provenant de cette jonque, et il ajoute : « Such casualties may have occurred in the early period of american history. »