Page:Gobineau Essai inegalite races 1884 Vol 2.djvu/518

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

unique, mais que seules et d’elles-mêmes elles ne sont pas aptes à concevoir. Il y a donc du nègre dans la création des monuments du Yucatan, mais du nègre qui, en excitant l’instinct jaune et en le portant à sortir de ses goûts terre à terre, n’a pas réussi à lui faire acquérir ce que l’initiateur même n’avait pas, le goût, ou, pour mieux dire, le vrai génie créateur (1)[1].

On doit tirer encore une conséquence de la vue de ces monuments. C’est que le peuple malais par lequel ils furent construits, outre qu’il ne possédait pas le sens artistique dans la signification élevée du mot, était un peuple de conquérants qui disposait souverainement des bras de multitudes asservies (2)[2]. Une nation homogène et libre ne s’impose jamais de pareilles créations ; il lui faut des étrangers pour les imaginer, lorsque sa puissance intellectuelle est médiocre, et pour les accomplir, lorsque cette même puissance est grande. Dans le premier cas, il lui faut des Chamites, des Sémites, des Arians Iraniens ou Hindous, des Germains, c’est-à-dire, pour employer des termes compris chez tous les peuples, des dieux, des demi-dieux, des héros, des prêtres ou des nobles omnipotents. Dans le second, cette série de maîtres ne peut se passer de masses serviles pour réaliser les conceptions de son génie. L’aspect des ruines du Yucatan induit donc à conclure que les populations mixtes de cette contrée étaient dominées, lorsque ces palais s’élevèrent, par une race métisse comme elles, mais d’un degré un peu plus élevé, et surtout plus affectée par l’alliage mélanien.

(1) D’Orbigny observe que c’est chez les Aymaras péruviens que l’on peut trouver, dans les œuvres architecturales, le plus d’idéalité ; encore n’est-ce jamais beau. (Ouvr. cité, t. I, p. 203 et seqq.) On a essayé de découvrir l’âge des monuments de Palenqué d’après la nature des stalactites déposées sur quelques murailles, d’après les couches concentriques formées par la végétation sur de très vieux arbres et par l’observation des couches de détritus accumulées à une hauteur de neuf pieds dans les cours. Cette méthode n’a pas donné de résultats sous un ciel aussi fécond que celui du Yucatan. (Prescott, ouvr. cité, t. III, p. 254.)

(2) Dans une des cours d’Uxmal, le pavé de granit, sur lequel sont figurées en relief des figures de tortues, est presque uni par les pas des anciennes populations. (Prescott, ibid.)


  1. (1) D’Orbigny observe que c’est chez les Aymaras péruviens que l’on peut trouver, dans les œuvres architecturales, le plus d’idéalité ; encore n’est-ce jamais beau. (Ouvr. cité, t. I, p. 203 et seqq.) On a essayé de découvrir l’âge des monuments de Palenqué d’après la nature des stalactites déposées sur quelques murailles, d’après les couches concentriques formées par la végétation sur de très vieux arbres et par l’observation des couches de détritus accumulées à une hauteur de neuf pieds dans les cours. Cette méthode n’a pas donné de résultats sous un ciel aussi fécond que celui du Yucatan. (Prescott, ouvr. cité, t. III, p. 254.)
  2. (2) Dans une des cours d’Uxmal, le pavé de granit, sur lequel sont figurées en relief des figures de tortues, est presque uni par les pas des anciennes populations. (Prescott, ibid.)