Page:Gobineau Essai inegalite races 1884 Vol 2.djvu/525

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

caractérisent leurs travaux et leurs œuvres, on a pu se convaincre que les civilisations américaines ne s’élevaient pas dans le détail, beaucoup au-dessus de ce que les meilleures races malaises de la Polynésie ont réussi à produire. Toutefois il ne faut pas se le dissimuler non plus, si défectueuses que nous apparaissent les organisations aztèque et quichna, il est cependant en elles quelque chose d’essentiellement supérieur à la science sociale pratiquée à Tonga-Tabou et dans l’île d’Hawaii ; on y aperçoit un lien national plus fortement tendu, une conscience plus nette d’un but qui est, de lui-même, d’une nature plus complexe ; de sorte que l’on est en droit de conclure, malgré beaucoup d’apparences contraires, que le mélange polynésien le mieux doué n’arrive pas encore tout à fait à égaler ces civilisations du grand continent occidental, et, en conséquence, on est amené à croire que, pour déterminer cette différence, il a fallu l’intervention locale d’un élément plus énergique, plus noble que ceux dont les espèces jaune et noire ont la disposition. Or il n’est dans le monde que l’espèce blanche qui puisse fournir cette qualité suprême. Il y a donc, à priori, lieu de soupçonner que des infiltrations de cette essence préexcellente ont quelque peu vivifié les groupes américains, là où des civilisations ont existé. Quant à la faiblesse de ces civilisations, elle s’explique par la pauvreté des filons qui les ont fait naître. J’insiste sur cette dernière idée.

Les éléments blancs, s’ils ont paru créer les principales parties de la charpente sociale, ne se révèlent nullement dans la structure de la totalité. Ils ont fourni la force agrégative, et presque rien de plus. Ainsi ils n’ont pas réussi à consolider l’œuvre qu’ils rendaient possible, puisque nulle part ils ne lui ont assuré la durée. L’empire de l’Anahuac ne remontait qu’au Xe siècle, tout au plus ; celui du Pérou, au XIe ; et rien ne démontre que les sociétés précédentes s’enfoncent à une distance bien lointaine dans la nuit des temps. C’est l’avis de M. de Humboldt, que la période du mouvement social en Amérique n’a pas dépassé cinq siècles. Quoi qu’il en soit, les deux grands États que les mains violentes de Cortez et de Pizarre ont détruits marquaient déjà l’ère de la décadence, puisqu’ils étaient inférieurs,