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fut d’une manière et avec des formes qui révélaient assez la nature de leur sang. Ces nouveaux venus différaient du tout au tout des Grecs du sud, et leurs procédés politiques le prouvèrent.

Les Hellènes méridionaux, après la conquête, s’empressaient de tout bouleverser. Sous le prétexte le plus léger, ils rasaient une ville et transplantaient chez eux les habitants réduits en esclavage. C’était de la même manière que les Chaldéens sémites avaient agi à l’époque de leurs victoires. Les Juifs en avaient su quelque chose lors du voyage forcé à Babylone ; les Syriens aussi, quand des bandes entières de leurs populations furent envoyées dans le Caucase. Les Carthaginois usaient du même système. La conquête sémitique pensait d’abord à l’anéantissement ; puis elle se rabattait tout au plus à la transformation. Les Perses avaient compris plus humainement et plus habilement les profits de la victoire. Sans doute, on relève chez eux plusieurs imitations de la notion assyrienne ; cependant, en général, ils se contentaient de prendre la place des dynasties nationales, et ils laissaient subsister les États soumis par leur épée, dans la forme où ils les avaient trouvés.

Ce qui avait été royaume gardait ses formes monarchiques, les républiques restaient républiques, et les divisions par satrapies, moyen d’administrer et de concentrer certains droits régaliens, n’enlevaient aux peuples que l’isonomie : l’état des colonies ioniennes au temps de la guerre de Darius et au moment des conquêtes d’Alexandre en fait suffisamment foi.

Les Macédoniens restèrent fidèles au même esprit arian. Après la bataille de Chéronée, Philippe ne détruisit rien, ne réduisit personne en servitude, ne priva pas les cités de leurs lois, ni les citoyens de leurs mœurs. Il se contenta de dominer sur un ensemble, dont il acceptait les parties telles qu’il les trouvait, de le pacifier et d’en concentrer les forces de manière à s’en servir suivant ses vues. Du reste, on a vu que cette sagesse dans l’exploitation du succès avait été devancée, chez les Macédoniens, par la sagesse à conserver précieusement leurs propres institutions. Avec tous les droits possibles de faire commencer leur existence politique plus haut encore que