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Page:Godard d’Aucour - Thémidore, 1908.djvu/123

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Le président monta à ma chambre peu de temps après : je lui racontai mon aventure ; il me demanda excuse des plaisanteries dont il avait diverti la compagnie et me promit qu’il ferait sortir Rozette dès le lendemain si je le voulais : il y eût réussi, son crédit est sans bornes, pour certaines choses, auprès des ministres. Il était en pointe de joie. Je le priai de n’en parler à personne et d’attendre que nous en eussions conféré ensemble ù tête reposée. Il y consentit, et se retira après m’avoir croqué plusieurs histoires plus amusantes les unes que les autres.

Il me fut impossible de dormir. Rozette revenait sans cesse à mon imagination. Pour me distraire, je me fis donner mes cartons à estampes et j’en commençai une revue générale. A proportion qu’elles étaient libres on plaisantes, je m(, rappelais les situations dans lesquelles je m’étais trouvé avec celle qu’on venait de m’enlever. €e souvenir étourdissait au moins ma douleur.

Enfin la nature se trouva accablée, un sommeil languissant s’empara de moi et me surprit au milieu de mes estampes éparses sans ordre sur toute la surface de mon lit. J’ai quelquefois dormi entre les bras de la réalité ; mais alors l’illusion était entre les miens.

À peine était-il sept heures du matin qu’un domestique vint me réveiller, parce que la gouvernante de M. Le Doux m’apportait une lettre et qu’elle voulait absolument me parler de la part de son maitre. Je donnai ordre qu’on l’introduisît. Elle fit quelque bruit en entrant pour avertir de son arrivée : J’avançai la tête, et, par l’ouverture de mes rideaux, j’entrevis un minois très gracieux. J’ai toujours été heureux au coup d’œil. Je me levai et, remuant ma couverture, je fis tomber plusieurs