Page:Godwin - Caleb Williams, II (trad. Pichot).djvu/290

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danger d’être à toute heure saisi et garrotté comme un criminel. J’ai voulu abandonner ma patrie ; on m’en a empêché. J’ai été forcé de recourir à mille déguisements. J’étais innocent, et pourtant il m’a fallu employer plus de ruses et d’artifices que le plus vil des scélérats. À Londres, je me suis vu harcelé avec le même acharnement, et j’y ai été tourmenté des mêmes alarmes que dans ma fuite à travers les provinces. Tant de persécutions m’ont-elles engagé à rompre enfin le silence ? Non ; je les ai endurées avec patience et soumission ; je n’ai pas fait une seule tentative pour les rejeter sur leur auteur.

» Enfin je tombai entre les mains de ces infâmes qui se nourrissent du sang des hommes. Dans cette affreuse situation, je tentai pour la première fois de repousser le fardeau dont on m’accablait, en me portant dénonciateur. Heureusement pour moi le magistrat de Londres rejeta avec hauteur et mépris toutes mes déclarations.

» Je ne fus pas longtemps à me repentir de mon imprudente démarche, et je me réjouis de son insuccès.

» Je confesse que, pendant ce temps, M. Falkland m’a donné divers témoignages d’humanité. Il avait tenté d’abord de s’opposer à ce que je fusse conduit en prison ; il avait contribué à adoucir les rigueurs de ma captivité ; il n’avait eu aucune part aux poursuites exercées avec tant d’acharnement contre moi, enfin, quand je fus mis en jugement, il fit en sorte que je fusse renvoyé en liberté. Mais une grande partie de ces actes de bienveillance m’étaient incon-