Page:Godwin - Caleb Williams, I (trad. Pichot).djvu/157

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doit pas un farthing de cuivre[1] : elle a toujours vécu de la charité de Votre Honneur.

— Âne et drôle que vous êtes ! je vous dis qu’elle me doit ; oui, elle me doit… onze cents livres. La loi m’autorise : pour qui croyez-vous donc que les lois sont faites ? Je ne fais que réclamer mon droit, mais j’entends en user.

— Je n’ai jamais disputé les ordres de Votre Honneur ; mais, en conscience, je ne puis me taire ; je ne peux pas voir perdre ainsi cette pauvre fille et vous perdre vous-même aussi, sans vous dire ce que je pense ; j’espère que vous me pardonnerez. Mais enfin, quand même elle vous devrait cette somme, elle ne pourrait être arrêtée. Elle n’est pas d’âge…

— Avez-vous fini, monsieur ? Pas tant de si et de mais. Pareille chose a déjà été faite à ma connaissance, et on peut bien la faire encore. Qui est-ce qui m’en empêchera ? voyons, qui ? Je veux que cela soit tout à l’heure ; je le veux, entendez-vous ? Dites à Swineard que s’il a seulement l’air d’hésiter, il y va de sa vie ! Je le ferai mourir de faim.

— Je supplie Votre Honneur d’y regarder à deux fois. Sur mon âme, tout le pays va crier contre vous.

— Barnes ! que voulez-vous dire ? je ne suis pas accoutumé à ce qu’on tienne des propos sur ma conduite, et je ne les endurerai pas. Je vous ai trouvé dévoué dans beaucoup d’occasions ; mais si je vois que vous vous joignez aux autres pour me disputer

  1. Un liard sterling.