Page:Godwin - Les Aventures de Caleb Williams, I (trad. Garnier).djvu/97

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venir un temps où nous aurions à regretter de n’avoir pas usé de prudence, et où il serait trop tard pour y avoir recours. Pourquoi deviendrions-nous ennemis ? Si nos goûts sont différens, poursuivons chacun notre carrière sans chercher à nous traverser. Nous possédons l’un et l’autre avec abondance tous les moyens de bonheur ; nous avons tout ce qu’il faut pour vivre long-temps tranquilles et heureux, respectés de tout ce qui nous environne. N’y aurait-il pas de la folie à abandonner une perspective aussi satisfaisante pour courir les chances d’une rivalité et d’une lutte pénibles. Entre gens de notre humeur, une telle position entraîne des suites dont l’idée me fait frémir. Je tremble, monsieur, qu’il n’en résulte la mort au moins pour l’un de nous deux, et pour le survivant le remords et le malheur pendant le reste de ses jours.

— Sur mon ame, vous êtes un homme fort singulier, un homme étrange ! Que