Page:Goethe-Nerval - Faust Garnier.djvu/252

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élevé ; soit les flots d’un troupeau, soit les flots d’une armée. Nous nous partageons ceux-là, et nous attaquons l’autre. Aujourd’hui, ô quel oubli ! Tu approches, il ne t’annonce point. La réception pleine d’honneur, due à une si noble étrangère, se trouve manquée. Il a, par ce forfait, mérité la mort ; déjà son sang aurait coulé ; mais toi seule as le droit de punir, ou de faire grâce à ton gré.

HÉLÈNE.

Cette haute autorité, telle que sur eux tu me l’accordes, comme arbitre, comme souveraine (et sans doute c’est une épreuve), je l’exerce maintenant ; le premier devoir d’un juge est d’entendre les accusés. — Parle donc !

LYNCÉUS, gardien de la tour.


Laissez-moi m’agenouiller, laissez-moi voir,
Laissez-moi mourir, laissez-moi vivre !
Car je suis dévoué tout entier
À cette femme envoyée des dieux.

J’attendais les délices du matin,
J’épiais à l’est l’arrivée du jour.
Tout d’un coup le soleil, devant moi,
Se leva par miracle au sud.

Mon regard tourné vers ce côté,
Au lieu des gorges, au lieu des hauteurs,
Au lieu de l’espace de la terre et des cieux,
Ne voyait plus que celle qui est sans égale.

Je suis doué d’un regard perçant,
Comme le lynx placé au haut des arbres ;
Mais, maintenant, il fallait que je fisse effort,
Comme au sortir d’un profond rêve ;

Je ne savais plus comment m’orienter ;
Le créneau, la tour, la porte fermée…
Les nuages planent et s’entr’ouvrent,
Et voici, la déesse en sort.

Les yeux et le sein tournés vers elle,
Je m’enivrais de ce doux éclat.
Cette beauté, combien elle éblouit !
Elle m’aveuglait tout à fait, malheureux !