Page:Goethe-Nerval - Faust Garnier.djvu/363

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pus, et pour toujours ; ses soins, sa douce autorité ne veilleront plus sur ses jeunes enfants, victimes désormais d’une marâtre insensible.

« Pendant que la cloche se refroidit, suspendons nos rudes travaux, et que chacun se divertisse comme l’oiseau sous le feuillage. Aux premières lueurs des étoiles, le serviteur, libre de tous soins, entend avec joie sonner l’heure du soir ; mais, pour le maître, il n’est point de repos. »

Le promeneur, qui s’est écarté bien loin dans les bois solitaires, précipite ses pas vers sa demeure chérie ; les brebis bêlantes, les bœufs au poil luisant, au large front, regagnent l’étable accoutumée ; le lourd chariot s’ébranle péniblement sous sa charge de moissons ; mais au-dessus des gerbes repose une couronne aux couleurs bigarrées, et la jeune troupe de moissonneurs s’envole à la danse.

Bientôt le silence se promène sur les places et le long des rues ; les habitants du même toit se réunissent autour du foyer commun, et les portes de la ville se ferment avec un long gémissement. La nuit s’épaissit encore, mais le citoyen paisible ne la redoute point ; si le méchant s’éveille avec l’ombre, l’œil de la loi est ouvert sur ses pas.

C’est l’ordre, fils bienfaisant du ciel, qui unit les hommes par des liens légers et aimables, qui affermit les fondements des villes, qui ravit à ses bois le sauvage indompté, s’assied dans les demeures des mortels, adoucit leurs mœurs, et donne naissance au plus saint des amours, celui de la patrie !

Mille mains actives s’aident d’un mutuel secours, et pour le même but tous les efforts s’unissent : le maître et les compagnons travaillent également sous la protection de la sainte liberté ; chacun vit content de son sort et méprise l’oisiveté railleuse, car le travail fait la gloire du citoyen, et le bonheur sa récompense : il s’honore de ses ouvrages comme le roi de son éclat.

Aimable paix, douce union, fixez-vous à jamais dans notre ville ; qu’il ne se lève jamais pour vous, le jour où les bandes sanglantes de la guerre envahiraient cette val-