Page:Goethe-Nerval - Faust Garnier.djvu/414

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— Courage, mon cheval noir. Je crois que le coq chante : le sablier bientôt sera tout écoulé… Je sens l’air du matin… Mon cheval, hâte-toi… Finie, finie est notre course ! Le lit nuptial va s’ouvrir… Les morts vont vite… Nous voici ! »

Il s’élance à bride abattue contre une grille en fer, la frappe légèrement d’un coup de cravache… Les verroux se brisent, les deux battants se retirent en gémissant. L’élan du cheval l’emporte parmi des tombes qui, à l’éclat de la lune, apparaissent de tous côtés.

Ah ! voyez !… au même instant s’opère un effrayant prodige : hou ! hou ! le manteau du cavalier tombe pièce à pièce comme de l’amadou brûlée ; sa tête n’est plus qu’une tête de mort décharnée, et son corps devient un squelette qui tient une faux et un sablier.

Le cheval noir se cabre furieux, vomit des étincelles, et soudain… hui ! s’abîme et disparaît dans les profondeurs de la terre : des hurlements, des hurlements descendent des espaces de l’air, des gémissements s’élèvent des tombes souterraines… Et le cœur de Lénore palpitait de la vie à la mort.

Et les esprits, à la clarté de la lune, se formèrent en rond autour d’elle, et dansèrent chantant ainsi : « Patience ! patience ! quand la peine brise ton cœur, ne blasphème jamais le Dieu du ciel ! Voici ton corps délivré… que Dieu fasse grâce à ton âme ! »


LA MERVEILLE DES FLEURS


Dans une vallée silencieuse brille une belle petite fleur ; sa vue flatte l’œil et le cœur, comme les feux du soleil couchant ; elle a bien plus de prix que l’or, que les perles et les diamants, et c’est à juste titre qu’on l’appelle la merveille des fleurs.

Il faudrait chanter bien longtemps pour célébrer toute