Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome II.djvu/147

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GŒTZ.

Comme j’en use, c’est vrai.

MARTIN.

C’est aussi ce que je veux dire. Mais nous… (George apporte de l’eau.)

GŒTZ, bas à George.

Va sur le chemin de Dachsbach, et couche-toi, l’oreille contre terre, pour écouter si tu n’entends point venir des chevaux, et reviens tout de suite.

(George sort.)
MARTIN.

Mais nous, quand nous avons bu et mangé, nous sommes justement le contraire de ce que nous devons être. Une digestion pénible met la tête à l’unisson de l’estomac, et, dans la langueur d’un lourd sommeil, se produisent des désirs qui deviennent aisément plus forts que nous.

GŒTZ.

Un verre, frère Martin, ne troublera pas votre sommeil. Vous avez beaucoup marché aujourd’hui. (Il lui offre à boire.) À tous les guerriers !

MARTIN.

Dieu vous entende ! (Ils trinquent.) Je ne puis souffrir les gens paresseux, et pourtant je ne puis dire que tous les moines le soient : ils font ce qu’ils peuvent. Je viens de Saint-Guy, où j’ai couché la nuit passée. Le prieur m’a conduit dans le jardin : c’est à présent leur atelier. D’admirables laitues, des choux à souhait, et surtout des choux-fleurs et des artichauts, comme on n’en voit pas en Europe !

GŒTZ.

Ce n’est donc pas votre affaire ? (Il se lève, cherche George et revient.)

MARTIN.

Ah ! je voudrais que Dieu m’eût fait jardinier ou forgeron ! Je pourrais être heureux. Mon couvent est à Erfurt en Saxe ; mon abbé m’aime : il sait que je ne puis rester en repos, et il m’envoie de côté et d’autre, où il y a quelque affaire à suivre. Je vais chez l’évêque de Constance.

GŒTZ.

Encore un coup !… Bon succès !