Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome II.djvu/158

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tout mon cœur, et lui dis : « L’évêque m’a touché la main : je gage qu’il ne m’a pas reconnu. » L’évêque m’entendit, car j’avais eu soin de parler haut, et il vint à nous fièrement… et dit : « Oui, c’est parce que je ne vous ai pas reconnu, que je vous ai touché la main. » Je répondis : « Monseigneur, j’ai bien remarqué que vous ne m’avez pas reconnu, c’est pourquoi je vous rends votre main. » Là-dessus le cou du petit homme devint aussi rouge de colère qu’une écrevisse, et il courut, dans la salle, au comte palatin Louis et au prince de Nassau, et leur en fit ses plaintes. Depuis, nous en avons ri souvent.

WEISLINGEN.

Je vous prie de me laisser seul.

GŒTZ.

Pourquoi cela ? Je vous en prie, soyez de bonne humeur. Vous êtes en mon pouvoir, et je n’en abuserai pas.

WEISLINGEN.

Cela ne m’a pas encore inquiété : c’est votre devoir de chevalier.

GŒTZ.

Et vous savez qu’il est sacré pour moi.

WEISLINGEN.

Je suis prisonnier : le reste est indifférent.

GŒTZ.

Vous ne devriez pas parler ainsi. Si vous aviez affaire à des princes, et s’ils vous tenaient aux fers dans une tour profonde, et que le gardien eût l’ordre de siffler pour vous empêcher de dormir ! (Les valets apportent des vêtements, Weislingen ôte ses armes et s’habille. Entre Charles.)

CHARLES.

Bonjour, mon père !

GŒTZ, l’embrassant.

Bonjour, mon garçon ! Comment avez-vous passé le temps ?

CHARLES.

Très-bien, mon père ! La tante dit que je suis très-habile.

GŒTZ.

Oh !

CHARLES.

M’as-tu apporté quelque chose ?