Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome II.djvu/170

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OLÉARIUS, à l’évêque.

Monseigneur, que dit-on de l’expédition contre les Turcs ?

L’ÉVÊQUE.

L’empereur n’a rien plus à cœur que de pacifier d’abord l’empire, d’étouffer les guerres intestines, et d’affermir l’autorité des tribunaux. Ensuite il marchera, dit-on, en personne contre les ennemis de l’empire et de la chrétienté. Maintenant ses affaires particulières lui donnent encore de l’occupation, et, malgré une paix de quarante années, l’empire est encore une caverne de brigands. La Franconie, la Souabe, le Haut-Rhin et les pays d’alentour sont dévastés par d’insolents et hardis chevaliers : Sickingen, Selbitz le boiteux, Berlichingen à la main de fer, bravent dans ces contrées la majesté impériale…

L’ABBÉ.

Oui, si Sa Majesté n’y prend garde, ces drôles finiront par nous mettre dans un sac.

LIEBETRAUT.

Ce serait un gaillard celui qui mettrait dans un sac le foudre[1] de Fulda !

L’ÉVÊQUE.

Le dernier surtout est, depuis nombre d’années, mon implacable ennemi, et me moleste plus que je ne puis dire ; mais cela n’ira pas loin, j’espère. L’empereur tient actuellement sa cour à Augsbourg : nous avons pris nos mesures ; cela ne peut nous manquer… Monsieur le docteur, connaissez-vous Adelbert de Weislingen ?

OLÉARIUS.

Non, monseigneur.

L’ÉVÊQUE.

Si vous attendez l’arrivée de cet homme, vous aurez le plaisir de voir, en une seule personne, le plus noble, le plus habile et le plus aimable chevalier.

OLÉARIUS.

Ce doit être un homme accompli, pour mériter de tels éloges d’une telle bouche.

LIEBETRAUT.

Il n’a fréquenté aucune université.

  1. Grande tonne d’une vaste capacité.