LA GOUVERNANTE.
Doit-elle terminer ses jours dans un cloître ?
LE SECRÉTAIRE.
Non pas dans un cloître : nous ne voulons pas confier un tel gage à des prêtres, qui pourraient bien s’en servir comme d’un instrument contre nous.
LA GOUVERNANTE.
Doit-elle donc aller aux Iles ? Explique-toi.
LE SECRÉTAIRE.
Tu l’apprendras. Pour le moment, calme-toi.
LA GOUVEUNANTE.
Comment puis-je être calme, en présence du péril et du malheur qui menacent ma chère enfant, qui me menacent moimême ?
LE SECRÉTAIRE.
Ta chère enfant peut aussi être heureuse là-bas, et toi, le bonheur et la joie t’attendent ici.
LA GOUVERNANTE.
Oh ! ne vous flattez pas d’une pareille espérance. Que vous sert de m’assaillir,- de m’engager, de me pousser au crime ? Elle-même, la noble enfant, elle déjouera votre dessein. Ne croyez pas l’entraîner sans danger, comme une victime résignée. Cet esprit courageux, qui l’anime, cette force héréditaire, la suivront où qu’elle porte ses pas, et briseront le piége trompeur dont vous l’entourez.
. . LE SECRÉTAIRE.
La maintenir ?… Que cela te réussisse ! Veux-tu me faire croire qu’une enfant, bercée jusqu’à ce jour dans les bras caressants du bonheur, montrera, dans cette crise imprévue, la réflexion et la force, l’adresse et la prudence ? Son esprit est formé, mais non pour l’action, et, si elle sent avec justesse et parle sagement, il lui manque beaucoup encore pour agir avecmesure. Le grand et libre courage de l’homme sans expérience dégénère aisément en faiblesse et en désespoir, quand la nécessité se présente devant lui. Ce que nous avons résolu, à toi de l’exécuter. Il en résultera un peu de mal et beaucoup de bien.
LA GOUVERNANTE.
Donnez-moi donc le temps de réfléchir et de me déterminer. LE SECRÉ