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Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome III.djvu/67

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Difficile pour vous !… Je ne sache pas ce qui pourrait vous devenir difficile.

LE COMTE.

Difficile, pénible et dangereux ! .. Croyez-vous que le commerce avec les esprits soit une chose agréable ? On ne les dompte pas, comme vous autres hommes, avec un regard, un serrement de main. Vous ne songez pas qu’ils me résistent, qu’ils me donnent de l’occupation, qu’ils s’efforcent de me subjuguer, qu’ils épient chacune de mes fautes, pour me surprendre. Déjà deux fois dans ma vie j’ai craint d’y succomber. C’est pourquoi je porte toujours cette arme sur moi (il tire de sa poche un pistolet.) pour m’ôter la vie, si j’avais à craindre de devenir leur sujet.

La NIÈCE, au Marquis. Quel homme ! La frayeur fait trembler mes genoux ! Je n’entendis jamais parler de la sorte, jamais parler de choses pareilles ! Je n’ai jamais rêvé à rien de semblable !

LE MARQUIS.

Si vous connaissiez une fois les lumières, la puissance de cet homme, vous seriez confondue.

LA NIÈCE.

Il est dangereux ! Je suis saisie de frayeur et d’angoisse !.,. (Pendant ce temps, le Comte est assis immobile, et regarde fixement devant lui.)

LA MARQUISE.

Où êtes-vous, comte ? Vous semblez absent !… Écoutez donc ! (Elle le saisit et le secoue.) Qu’est cela ? Il ne remue pas ! Écoutezmoi donc !

Le Marquis, s’approchant. Vous êtes connaisseur en pierreries : combien estimez-vous cette bague ?… Il a les yeux ouverts et ne me regarde pas. La Marquise, le tenant encore par la main. Aussi roide que le bois, comme s’il n’y avait en lui aucune vie !

LA NIÈCE.

Serait-il évanoui ? Il parlait avec tant de véhémence ! Voici des sels à respirer.