Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome III.djvu/89

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goûtée ! Je félicite et vous et moi.

LE CHEVALIER.

Ne me laisse pas plus longtemps dans l’incertitude. *

LE COMTE.

Tu as mis à fin la plus étrange aventure ; tu t’es donné toimême la dignité de maître ; tu as enlevé, comme d’assaut, les priviléges du troisième degré.

LE CHEVALIER.

Je suis encore dans le doute et l’incertitude.

LE COMTE.

Je souhaiterais maintenant que ta raison t’expliquât ce que ton cœur a mis en pratique. Avec un peu d’attention, tu en viendras à bout facilement. Quelles étaient tes espérances comme disciple du premier degré ?

LE CHEVALIER.

De devenir meilleur que je ne suis, et de réaliser, par votre secours, le bien que je reconnais.

LE COMTE.

Et qu’as-tu appris, quand tu as entendu de la bouche du chanoine les maximes du second degré ?

LE CHEVALIER.

J’ai appris avec horreur que vous n’aviez fait jusqu’alors que dissimuler et vous jouer de vos disciples ; que ceux que vous appelez compagnons, l’on voulait en faire des politiques, les façonner en égoïstes, arracher de leur sein les plus tendres sentiments de l’amitié, de l’amour, de la fidélité et de tout noble élan qui rend notre cœur irrésistible ; et que l’on voulait, j’ose le dire, en faire des hommes vulgaires, absolument vulgaires, mauvais, absolument mauvais. Tu sais avec quelle horreur j’ai rejeté cette transformation. Je n’ai rien à dire de plus ; je ne changerai pas de sentiments, et…. laisse-npi partir.

LE COMTE.

C’est justement pour cela que je te presse sur mon cœur ; qu’en ta présence je jette mon chapeau loin de moi, et te salue comme maître. Tu as surmonté l’épreuve, tu as échappé à la tentation, tu t’es montré l’homme que je cherche. Tout ce que tu as entendu de la bouche du chanoine, ce que cet infor-