Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome IV.djvu/208

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cesse te dirige avec amour, te commande d’étendre proprement le tapis sur la table, et même de saupoudrer de sable le parquet1. O main chérie, main divine, par toi la cabane devient un parvis céleste. Et ici…. (Il soulève un rideau du Ut.) Quel frisson de volupté me saisit ! Ici je pourrais m’arrêter des heures entières. Nature, ici, dans des songes légers, tu achevas de former cet ange né sur la terre ; ici reposa cette enfant, au tendre sein, rempli de chaleur et de vie ; et ici, avec une sainte et pure activité, se développa l’image des dieux. Et toi, qu’estce qui t’amène ? Que je me sens profondément ému ! Que vienstu chercher ici ? Pourquoi ton cœur est-il oppressé ? Misérable Faust, je ne te connais plus. Ici suis-je enveloppé d’une vapeur enchantée ? Je courais à la jouissance, et je me perds en amoureuses rêveries ! Sommes-nous le jouet de chaque impression de l’air ? Et, si elle entrait tout à coup, comme tu expierais ton audace ! Ah ! le grand Jean serait bien petit ! Il se fondrait aux pieds de la jeune lille.

MÉPHISTOPHÉLÈS.

Vite !… Je la vois qui arrive là-bas.

FAUST. .

Partons, partons : je ne reviendrai jamais.

MÉPHISTOPHÉLÈS.

Voici une cassette passablement lourde. J’ai été la prendre autre part. Placez-la toujours dans l’armoire : je vous jure qu’elle en sera hors de sens. J’ai mis dedans de petites choses pour en gagner une autre. Mais un enfant est un enfant, un jeu est un jeu.

FAUST.

Je ne sais si je dois….

MÉPHISTOPHÉLÈS.

Que de questions ! Songez-vous peut-être à garder le trésor ? Alors je conseille à votre convoitise d’épargner vos précieux moments et ma peine désormais. J’espère que vous n’êtes pas avare. (Il place la cassette dans l’armoire et referme la serrure.) Je me gratte la tète et me frotte les mains (partons vite !), alin de tourner la douce et jeune enfant au gré de votre cœur, et vous

I. C’est l’usage en Allemagne.

voilà comme si