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Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome IX.djvu/232

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de Junon, dont l’original se trouve dans la villa Ludovisi. Elle a été mon premier amour à Rome, et maintenant je la possède. Il n’est point de paroles qui puissent en donner l’idée. C’est un chant d’Homère. Mais j’ai bien mérité pour l’avenir une si bonne compagnie, car je puis vous annoncer maintenant cpïlphirjénie est enfin terminée. En voilà sur ma table deux copies assez pareilles, dont une ira bientôt se présenter à vous. Accueillez-la avec bienveillance. Ce n’est point là ce que j’aurais dû faire, mais on pourra deviner ce que j’ai voulu. Vous vous êtes plaints quelquefois de trouver dans mes lettres des endroits obscurs, où je faisais allusion à une certaine angoisse que je sentais au milieu des spectacles les plus magnifiques. Cette belle Grecque, ma compagne de voyage, n’y avait pas une petite part, en me forçant au travail quand j’aurais voulu contempler. Je me souviens de cet excellent ami qui s’était préparé pour un long voyage, qu’on aurait bien pu appeler un voyage de découvertes. Après avoir étudié et économisé dans ce but pendant plusieurs années, il eut à la fin aussi l’idée de séduire une fille de bonne maison, parce qu’il pensa que ce serait faire d’une pierre deux coups. Je résolus aussi étourdiment d’emmener Iphigcnie à Carlsbad. Je vais dire en peu de mois en quel lieu je me suis surtout occupé d’elle. Quand j’eus passé le Brenner, je la tirai de ma valise et la planai à mon côté. Au bord du lac de Garde, où le vent violent du sud poussait les flots contre le rivage, où j’étais pour le moins aussi seul que mon héroïne sur le rivage de Tauride, je traçai les premières lignes du remaniement, que je continuai à Vérone, à Vicence, à Padoue, et surtout à Venise. Ensuite l’ouvrage fut suspendu quelque temps ; je fus même conduit à une idée nouvelle, savoir d’écrire Tphigénie à Delphes ; et je l’aurais fait sur-le-champ, si la distraction et le sentiment de mon devoir envers la première pièce ne m’avaient pas retenu. A Rome, je continuai mon travail avec assez de constance. Le soir, avant de me coucher, je préparais ma tâche pour le lendemain, et je me mettais à l’ouvrage dès mon réveil. Mon procédé était fort simple : je transcrivais la pièce tranquillement en l’assujettissant au rhythme régulier, ligne après ligne, période après période. Vous jugerez du résultat. En cela, j’ai