Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome IX.djvu/343

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formé des roches dont elle baignait le pied. Les murs étaient en partie taillés dans le roc, en partie construits de matériaux qu’on en avait tirés ; derrière les murs s’élevaient les temples rangés à la file. Il ne faut donc pas s’étonner que, vues de la mer, la ville basse, la partie qui s’élevait par degrés et celle qui était la plus haute, présentassent un aspect imposant.

Le temple de la Concorde a résisté à l’effet des siècles. Son architecture svelte le rapproche déjà de notre mesure de l’agréable et du beau. Il est aux temples de Pœstum ce qu’est la figure des dieux à celle de géants. Je ne veux pas me plaindre de ce qu’on a exécuté san* goût le projet louable de restaurer ces édifices, en remplissant les brèches avec du plâtre d’une blancheur éblouissante. Par ià on peut dire que le monument se présente encore à l’œil comme une ruine. Qu’il eût été facile de donner au plâtre la couleur de la pierre effleurie I Quand on voit avec quelle facilité se détache le calcaire coquillier des colonnes et des murs, on s’étonne qu’il ait duré si longtemps.

Mais les constructeurs, espérant une postérité pareille à euxmêmes, avaient trouvé un préservatif : on voit encore sur les colonnes les restes d’une fine crépissure, qui flattait l’œil et qui devait garantir la durée.

Nous avons fait notre, deuxième station devant les ruines du temple de Jupiter. Elles s’étendent au loin, comme les ossements d’un colossal squelette, au dedans et au dehors de plusieurs petites possessions, coupées de haies, couvertes de plantes hautes et basses. Toute forme a disparu de ces décombres, excepté un triglyphe énorme et un fragment d’une colonne de même proportion. J’ai mesuré le triglyphe avec mes bras étendus et je n’ai pu l’embrasser. Pour la cannelure de la colonne, voici ce qui peut en donner une idée : en m’y tenant debout, je la remplissais comme une petite niche, touchant les deux côtés avec mes épaules. Vingt-deux hommes placés en rond les uns à côté des autres formeraient à peu près la circonférence d’une pareille colonne. Nous nous sommes éloignés avec le sentiment désagréable qu’il n’y avait là rien à faire pour le dessinateur.

Le temple d’Hercule, au contraire, laisse apercevoir encore des traces de son ancienne symétrie. Les deux rangées de colonnes qui accompagnaient le temple de part et d’autre, étaient