Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome IX.djvu/353

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travers champs pour un procès. Nous avons vu .avec étonnement ces deux graves personnages debout devant une de ces touffes de chardons, armés de leurs couteaux tranchants, et couper le haut des tiges. Ils prenaient ensuite du bout des doigts leur butin épineux, ils pelaient la tige et mangeaient l’intérieur avec délices. Ils se livrèrent longtemps à cette occupation, tandis que nous nous réconfortions avec de bon pain-et du vin, cette fois sans mélange. Le voiturin nous prépara de ces tiges, et nous assura que c’était une nourriture saine et rafraîchissante ; mais elle fut aussi peu de notre goût que les choux-raves crus de Ségcste.

Arrivés dans la vallée où serpente le fleuve Saint-Paul, nous trouvâmes le sol d’un noir rougeâtre et un calcaire efflorescent, beaucoup de terres en friche, de vastes champs, une belle vallée, que le petit fleuve rend très-agréable. L’excellent sol argileux, mélangé, a parfois jusqu’à vingt pieds de profondeur et presque sans varier. Les aloès avaient poussé de fortes tiges ; le blé était beau, mais quelquefois mêlé de mauvaise herbe, et bien inférieur aux champs du sud de l’île. Ça et là de petites habitations ; point d’arbres, si ce n’est sous les murs de CastroGiovanni. Au bord de la rivière, beaucoup de pâturages resserrés par des masses énormes de chardons. Dans les cailloux de la rivière, du quartz ou simple ou brèche.

Moliménti, petite ville neuve, très-convenablement placée au milieu de belles campagnes, au bord du Saint-Paul. Dans le voisinage, le blé était incomparable ; on le moissonne dès le 20 mai. La contrée ne montre encore aucuns vestiges volcaniques. Le fleuve même ne charrie aucuns galets de ce genre. La terre, heureusement mélangée, plutôt forte que légère, est en général d’un brun violet. Toutes les montagnes à gauche, qui servent au fleuve de barrière, sont grès et calcaire : je n’ai pu observer le passage de l’un à l’autre. Ces montagnes, en s’effleurissant, ont préparé la grande fertilité, partout égale, de la vallée inférieure.

En chemin, mardi 1er mai 1787.

En descendant cette vallée si inégalement cultivée, quoique destinée tout entière par la nature à la fécondité, nous étions dans des dispositions assez mélancoliques, parce que, après