Ferdinand sa petite Claire. Un extrait de la réponse que je fis alors fera mieux connaître quels étaient mes sentiments et ma situation.
« Combien je souhaiterais de satisfaire à votre désir et de pouvoir apporter au legs d’Egmont quelque modification ! Je courus, par une admirable matinée, avec votre lettre à la villa Borghèse ; je rêvai deux heures à la marche delà pièce, aux caractères, aux situations, et je ne pus rien trouver à abréger. Que j’aimerais à vous écrire toutes mes réflexions, le pour et le contre ! Cela remplirait un cahier, et ce serait une dissertation sur l’économie de ma pièce. Dimanche, j’allai voir Angélique et je lui soumis la question. Elle a étudié la pièce et elle en possède une copie. Que n’étais-tu là pour entendre avec quelle délicatesse de femme elle expliquait tout ! Et voici sa conclusion : Ce qu’il vous semble que le héros devrait dire encore est renfermé implicitement dans l’apparition. Comme l’apparition n’exprime, dit-elle, que ce qui se passe dans l’âme du héros endormi, aucunes paroles ne pourraient dire avec plus de force combien il aime et il estime la jeune fille, que ne le fait ce songe, qui n’élève pas l’aimable créature jusqu’à lui, mais audessus de lui. Angélique trouve fort bien que cet homme, qui, en quelque sorte, songea en veillant durant toute sa vie, qui estimait au plus haut prix l’amour et la vie, ou plutôt qui ne les estimait que par la jouissance, finisse en quelque sorte par veiller en songeant, et qu’on nous dise sans langage combien est profond son amour pour cette jeune fille, et quelle place choisie, éminente, elle occupe dans son cœur. Elle ajouta diverses réflexions : que, dans la scène avec Ferdinand, il ne pouvait être question de Claire que d’une manière subordonnée, pour ne pas amoindrir l’intérêt des adieux du jeune ami, qui était d’ailleurs, dans ce moment, hors d’état de rien entendre. »
Rome, 5 janvier 1788,
Excusez-moi si ma lettre est brève aujourd’hui. J’ai commencé cette année par l’étude et le travail, et j’ai à peine le loisir de me reconnaître.
Après une interruption de quelques semaines, pendant les-