Aller au contenu

Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome VI.djvu/147

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée



Chapitre II

Le baron arriva quelques jours après, et Mélina ne le vit pas sans frayeur. Le comte l’avait annoncé comme un connaisseur, et l’on devait craindre qu’il ne découvrît bientôt le côté faible de ce petit groupe, et ne reconnût que ce n’était point une troupe formée, car elle était à peine en état de jouer convenablement une seule pièce : mais directeur et comédiens furent bientôt délivrés de tout souci, car ils trouvèrent dans le baron un homme à qui le théâtre national inspirait le plus vif enthousiasme, et pour qui toutes les troupes et tous les comédiens du monde, étaient bons et bienvenus. Il les salua tous d’un ton solennel, se félicita de rencontrer à l’improviste une société d’artistes allemands, de se lier avec eux, et d’introduire les muses nationales dans le château de son parent. Là-dessus il tira de sa poche un cahier, dans lequel Mélina se flattait de lire les clauses du contrat ; mais c’était tout autre chose. Le baron pria les comédiens d’écouter avec attention un drame de sa composition, qu’il désirait de leur voir jouer. Ils formèrent le cercle volontiers, charmés de pouvoir se mettre, à si peu de frais, dans les bonnes grâces d’un homme si nécessaire, bien qu’à voir l’épaisseur du cahier, chacun craignît que la séance ne fut d’une longueur démesurée. Ces craintes se réalisèrent : la pièce était en cinq actes et de celles qui ne finissent pas.

Le héros était un homme de haute naissance, vertueux, magnanime et, avec cela, méconnu et persécuté, mais qui finissait par triompher de ses ennemis, sur lesquels se serait alors exercée la justice poétique la plus sévère, si le héros ne leur avait pardonné sur-le-champ.

Pendant la lecture, chaque auditeur eut assez de loisir pour