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DE WILHELM MEtSTER. 577 7

GOETHE.–ANN.D’APPR. gy

Laissez-moi ! Courez, sauvez l’enfant ! Félix est empoisonné !)’ »

On le lâcha et tout le monde, saisi d’horreur, courut sur ses pas, en appelant le docteur. Augustin se dirigea vers la chambre de l’abbé, où l’on trouva l’enfant, qui parut effrayé et embarrassé, lorsqu’on lui cria de loin

« Qu’as-tu fait ` ?

Cher papa, répondit Félix, je n’ai pas bu à la bouteille ; j’ai bu au verre j’avais soif. »

Augustin, les mains jointes, s’écria « Il est perdu, puis il se fit jour à travers les assistants et s’enfuit.

On trouva sur la table un verre de lait d’amande et, à coté, une carafe plus qu’à moitié vide. Le docteur arriva ; on le mit au fait, et il reconnut avec effroi, sur la table, le flacon d’opium il était vide. Il demanda du vinaigre, et mit en usage toutes les ressources de son art.

Nathalie fit transporter l’enfant dans une autre chambre ; elle lui prodiguait ses soins ; l’abbé avait couru à la recherche d’Augustin, pour lui arracher quelques éclaircissements. Le malheureux père l’avait déjà cherché inutilement, et, à son retour, il trouva tous les visages inquiets et troublés. Le docteur avait examiné le lait d’amande qui était dans le verre, et avait reconnu qu’il contenait une très-forte dose d’opium. L’enfant était couché sur un lit de repos et paraissait fort malade ; il priait son père qu’on ne lui fît plus avaler rien, qu’on voulût bien ne plus le tourmenter. Lothaire avait envoyé ses gens de tous côtés ; il était parti lui-même à cheval, pour découvrir la trace d’Augustin. Nathalie était assise auprès de Félix il se réfugia sur ses genoux, la suppliant de le protéger, la priant de lui donner un morceau de sucre le vinaigre était trop mauvais. Le docteur le permit, disant qu’il fallait laisser un peu de repos à l’enfant, qui était dans la plus affreuse agitation on avait fait ce que la prudence conseillait ; il ferait tout ce qui était possible. Le comte survint, quelque peu mécontent, à ce qu’il semblait. Il avait l’air grave et même solennel il imposa les mains à l’enfant, leva les yeux au ciel, et resta quelques moments dans cette attitude. Wilhelm, inconsolable, s’était jeté sur un siège ; il se leva brusquement, porta sur Nathalie un rc