Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome VII.djvu/197

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Le major, revenu dans ses domaines, s’occupa sans cesse à les visiter et les étudier. 11 eut sujet d’observer qu’un dessein juste et sage rencontre, dans l’exécution, des obstacles de tout genre ; qu’il est traversé par mille accidents, au point que l’idée première s’évanouit presque entièrement, et semble, pour le moment, anéantie, mais qu’enfin, au milieu de toutes ces perturbations, la possibilité de la réussite s’offre de nouveau à notre esprit, si nous voyons le temps venir à notce aide, comme le meilleur allié d’une invincible constance.

De même, alors, après avoir entendu les judicieuses observations d’intelligents économes, l’affligeant spectacle de grands et beaux domaines, entièrement négligés, aurait jeté le major dans le découragement, si l’on n’avait pas prévu, en même temps, qu’un certain nombre d’années, employées avec sagesse et probité, suffirait pour rendre la vie à ce qui était mort, imprimer le mouvement à ce qui languissait, enfin, pour atteindre, avec le secours de l’ordre et de l’activité, le but qu’on se proposait.

L’insouciant maréchal était arrivé, et il avait amené un grave jurisconsulte, qui donna du reste moins d’inquiétude au major que son frère, un de ces hommes qui agissent sans un but ou qui refusent les moyens de l’atteindre. Un bien-être de chaque jour et de chaque moment était l’indispensable besoin de sa vie. Après une longue hésitation, il était enfin sérieusement résolu à se délivrer de ses créanciers, à se débarrasser de terres qui lui étaient à charge, à réparer le désordre de sa maison, à jouir sans soucis d’un revenu convenable et assuré, mais sans renoncer le moins du monde aux avantages dont il avait joui jusqu’alors.

Il accordait tout ce qui devait mettre son frère et sa sœur en paisible possession des terres, et particulièrement du château, mais il ne voulut pas abandonner absolument ses droits à un certain pavillon voisin, dans lequel il avait coutume de célébrer son anniversaire avec ses plus vieux amis et ses plus nouvelles connaissances ; il se réservait aussi le jardin de plaisance attenant au pavillon, et qui le reliait avec le château. Tous les meubles devaient rester dans l’état actuel, avec les gravures qui décoraient les chambres ; il se faisait promettre aussi les fruits des espaliers. On devait lui délivrer fidèlement les pêches,