sur les rives desquels s’élevait çà et là une roche moussue. On apercevait sur les collines des cabanes éparses, entourées de verdure ; dans les douces vallées, les maisons se serraient davantage. Ces gracieuses chaumières des coteaux étaient assez séparées, pour que les sons, justes ou faux, ne pussent s’entendre de l’une à l’autre.
Ils approchèrent ensuite d’une grande place, entourée de. bâtiments et d’ombrages, où ils trouvèrent une foule serrée, qui semblait être dans une vive attente. A l’instant même où Wilhelm arrivait, commença une grande symphonie, exécutée par tous les instruments, et dont il admira la douce et puissante harmonie.
A côté du spacieux orchestre, on en voyait un plus petit, qui lui fournit le sujet d’une observation particulière. Il s’y trouvait des élèves d’âges différents ; chacun tenait son instrument tout prêt, sans jouer : c’étaient ceux qui ne pouvaient ou n’osaient pas encore prendre part à la symphonie. On observait avec intérêt qu’ils semblaient sur le point de se risquer, et l’on assurait que rarement une de ces fêtes se passait sans qu’il se révélât tout à coup quelque talent.
Comme des chants s’entremêlèrent aux morceaux de musique instrumentale, on ne pouvait douter que la musique vocale ne fût aussi cultivée. Le voyageur ayant demandé quel autre enseignement s’unissait à celui-là, il apprit que c’était celui de la poésie, et particulièrement de la poésie lyrique. L’essentiel est que les deux arts se développent pour eux-mêmes et par euxmêmes, puis l’un pour l’autre et l’un avec l’autre. Les élèves apprennent à les connaître tous deux dans leur caractère propre ; ensuite on leur enseigne comment ils agissent l’un sur l’autre, et puis s’affranchissent mutuellement.
Au rhythme poétique le musicien oppose la mesure et le mouvement. Mais c’est en cela que la musique parait bientôt dominer la poésie : car si, comme il est juste et nécessaire, la poésie observe toujours, aussi purement que possible, la quantité, il se trouve pour le musicien peu de syllabes décidément courtes ou longues ; il brise arbitrairement le travail le plus consciencieux du poète ; il change même la prose en chant, d’où résultent les plus étranges conséquences, et le poète se verrait bien-