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Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome VII.djvu/525

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verdit et se développe aussitôt. Tous ces groupes d’arbres, ces bosquets et ces bois, hélas ! je les ai vus croître. Les dômes de ces pins, les obélisques de ces cyprès, ces colosses de chênes et de hêtres, tous furent de petits rameaux, plantés de ma main, comme un funèbre monument, dans un sol auparavant stérile. »

La vieille avait fait peu d’attention à ces paroles, étant toujours occupée de sa main, qui, en présence du Beau lis, lui semblait devenir de minute en minute plus noire et plus petite. Elle allait prendre sa corbeille et s’éloigner, lorsqu’elle s’avisa qu’elle avait oublié le meilleur. Elle tira le chien métamorphosé de la corbeille et le plaça sur le gazon non loin de la belle.

  • Mon mari, dit-elle, vous envoie ce souvenir. Vous savez que vous pouvez animer par votre attouchement cette pierre précieuse. Le gentil et fidèle animal vous procurera certainement beaucoup de plaisir, et je ne pourrais me consoler de le perdre, si je n’avais pas l’idée que vous le possédez..».

Le Beau lis considéra la jolie béte avec plaisir et, à ce qu’il parut, avec étonnement.

< r Bien des signes se rencontrent, dit-elle, qui font naître chez moi quelque espérance ; mais, hélas ! n’est-ce pas seulement une illusion de notre esprit, de nous figurer que nous touchons au plus grand bien quand beaucoup de maux nous assiégent ? »

Après avoir dit ces mots, la belle se mit a chanter les strophes suivantes :

« De quel secours sont-ils pour moi, tous ces signes favorables, la mort de l’oiseau, la main noire de mon amie ? Le chien d’onyx a-t-il son pareil ? Et la lampe ne me l’a-t-elle pas envoyé ?

« Éloignée des douceurs de la société humaine, je ne connais plus que la douleur. Ah ! pourquoi le temple ne s’élève-t-il pas au bord de la rivière ? Pourquoi le pont n’est-il pas construit ? »

La bonne femme avait écouté avec impatience ce chant, que le Beau lis accompagnait des doux sons de sa harpe, et qui aurait ravi toute autre personne. Elle allait prendre congé, quand elle fut de nouveau retenue par l’arrivée du serpent vert. Il avait entendu les derniers mots de la chanson, et là-dessus il s’empressa de dire au Beau lis d’avoir bon courage.

« La prédiction du pont est accomplie, lui dit-il. Demandez à