Pourquoi pas ? Les animaux ne sont que la caricature de l’homme.
Vous savez ce qu’un voyageur nous raconte de la ville de Gratz, qu’il y trouva tant de chiens et tant d’hommes muets, presque idiots : ne se pourrait-il pas que la vue habituelle de tant de bêtes brutes, aboyantes, eût quelque influence sur les générations humaines ?
Assurément la société des animaux est un dérivatif de nos passions et de nos penchants.
Et si la raison, comme on dit, a quelquefois des éclipses, assurément elle en doit avoir en présence des chiens.
Heureusement, nous n’avons dans la société personne que Mme Seyton qui aime les chiens. Elle chérit son joli lévrier.
Et, en qualité de mari, je dois prendre à cet animal un intérêt tout particulier. »
Mme Seyton fit de loin à son mari une menace badine.
Ce lévrier prouve ce que Sinclair disait tout à l’heure, que ces créatures sont des dérivatifs pour les passions. Ma chère, dit-il à sa femme en élevant la voix, oserai-je raconter notre histoire ? Elle nous fait honneur à tous deux.
Mme Seyton donna son consentement par un signe amical, et monsieur commença en ces termes :
« Nous étions épris l’un de l’autre et nous avions résolu de nous marier, avant que la perspective d’un établissement se fût présentée. Enfin il s’offrit une espérance fondée ; mais j’avais à faire encore un voyage, qui menaçait de me retenir plus longtemps que je n’aurais voulu. À mon départ, je laissai à ma bien-aimée mon lévrier. Il m’avait souvent suivi chez elle ; il était revenu avec moi ; quelquefois aussi il était resté. Dès lors il lui appartint, il lui tenait joyeuse compagnie et présageait mon retour. À la maison, c’était un amusement ; à la pro-