Nous tombons, je le crains, dans le ton ordinaire sur lequel on entend parler les hommes, surtout quand ils ont la pipe à la bouche.
Laisse, Amélie : il n’est rien de plus innocent que de pareilles opinions, et il est toujours bon d’apprendre ce que les autres pensent de nous. Eh bien, celles qui refusent, qu’avez-vous à en dire ?
Je puis parler ici à cœur ouvert : il y en a peu, je crois, dans notre chère patrie ; il n’y en a point du tout en France, et cela, parce que, soit chez nous, soit chez nos galants voisins, les femmes jouissent d’une louable liberté ; mais, dans certains pays, où elles sont très-gênées, où la bienséance extérieure est sévère, où les plaisirs publics sont rares, elles doivent se trouver en plus grand nombre. On a même, dans un pays voisin, un nom particulier, par lequel le peuple, les philosophes et même les médecins les désignent.
Et ce nom, ne le faites pas attendre. Je ne puis deviner les noms.
On les nomme, puisqu’il faut le dire, les friponnes.
C’est assez singulier.
Il fut un temps où vous avez pu lire, avec un grand intérêt, les fragments du physionomiste suisse ; ne vous souvient-il pas d’y avoir trouvé quelque chose sur les friponnes ?
C’est possible, mais cela ne m’a pas frappée. Peut-être ai-je pris ce mot dans le sens ordinaire, et ne m’y suis-je pas arrêtée.
Il est vrai que, dans le sens ordinaire, le mot fripon désigne une personne qui joue avec malice et gaieté de méchants tours à quelqu’un ; mais là il désigne une dame qui, par une indifférence, une froideur, une retenue, qui a souvent l’apparence