Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome VIII.djvu/176

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nes s’arrêtèrent dans un bois de sapins, et le landgrave, affaibli par l’âge, s’appuya contre un arbre, afin de pouvoir continuer plus longtemps l’entretien, qui, de part et d’autre, ne fut pas sans émotion. La place fut marquée plus tard d’une manière simple et naïve, et j’ai fait quelquefois ce pèlerinage avec de jeunes amis.

Nous avions ainsi passé quelques heures à rappeler les vieilles choses, à méditer les nouvelles, quand les flots du cortège, mais plus courts et plus serrés, passèrent une seconde fois devant nos yeux, et nous pûmes observer de plus près le détail, le noter et le graver dans noire mémoire. Dès ce moment, la ville fut dans un mouvement continuel ; car jusqu’à ce que tous et chacun de ceux qui en avaient le droit et le devoir eussent offert leurs hommages aux personnes les plus éminentes, et se fussent présentés à chacune d’elles, les allées et les venues n’eurent point de fin, et l’on put récapituler à son aise et en détail la maison de chacun de ces augustes personnages.

Cependant les insignes approchaient ; mais, pour que les disputes traditionnelles ne fissent pas défaut, ils durent passer la moitié du jour et une grande partie de la nuit en pleine campagne, à cause d’une contestation entre l’électeur de Mayence et Francfort, au sujet du territoire et de l’escorte. Francfort céda. Ceux de Mayence escortèrent les insignes jusqu’à la barrière, et l’affaire fut ainsi réglée pour cette fois.

Pendant ces jours, je ne fus pas un moment à moi. Chez nous, j’avais à écrire et à copier. On voulait et l’on devait tout voir. Ainsi s’acheva le mois de mars, dont la seconde moitié avait été pour nous si pleine de fêtes. J’avais promis à Marguerite une relation fidèle et détaillée des dernières solennités et de ce que promettait le couronnement. Le grand jour approchait ; je songeais plus à la manière dont je lui dirais les choses qu’à ce que j’avais proprement à dire. Je me hâtai de mettre en œuvre pour ce prochain et unique usage tout ce qui passait sous mes yeux et sous ma plume de secrétaire. Enfin je me rendis chez elle un soir assez tard. Cette fois, me disais-je avec complaisance, mon récit aurait encore bien plus de succès que le premier que j’avais improvisé ; mais bien souvent une inspiration