Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome VIII.djvu/321

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plus de connaissances en matière de droit que je n’ai pris occasion de le faire paraître jusqu’ici dans ces mémoires ; mais tout mon fait n’était qu’une vue générale et encyclopédique, et ne pouvait passer pour une connaissance solide et positive. La vie universitaire, lors même que nous ne pouvons nous vanter d’une sérieuse application, procure néanmoins, en tout genre de culture, d’immenses avantages, parce que nous sommes sans cesse entourés d’hommes qui possèdent ou qui cherchent la science, si bien que dans une pareille atmosphère, nous puisons toujours, même à notre insu, quelque nourriture.

Mon répétiteur, après avoir écouté quelque temps avec patience mes divagations, me fit enfin comprendre qu’avant tout je devais avoir en vue mon but prochain, c’est-à-dire de subir mes examens, de prendre mes degrés et peut-être de passer ensuite à la pratique. « Pour nous en tenir au premier point, disait-il, ce n’est pas une si vaste entreprise ; on ne demande point où ni comment une loi a pris naissance, quelle en a été la cause intérieure ou extérieure ; on ne recherche point comment elle s’est modifiée par le temps et la coutume ; on examine tout aussi peu à quel point elle s’est transformée peut-être par une fausse interprétation ou par une pratique mal entendue. De savants hommes consacrent tout spécialement leur vie à ces recherches ; mais nous, nous voulons savoir ce qui subsiste actuellement ; nous le gravons fermement dans notre mémoire, afin de l’avoir toujours présent à l’esprit quand nous voulons nous en servir pour l’avantage et la défense de nos clients. De la sorte, nous pourvoyons nos jeunes gens pour les besoins actuels ; le reste, ils l’acquièrent à proportion de leurs talents et de leur activité. » Là-dessus, il me remit ses cahiers, qui étaient écrits par demandes et par réponses, et sur lesquels je pus aussitôt soutenir un examen passable, parce que j’avais encore le petit catéchisme juridique de Hopp tout entier dans ma mémoire ; je suppléai au reste par quelque application, et, bon gré mal gré, je me mis, le plus facilement du monde, en état de passer mon examen.

Mais, comme toute activité propre dans l’étude m’était retranchée sur cette voie, attendu que rien de positif ne pouvait m’entrer dans l’esprit, et que je voulais avoir de toute chose