Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome VIII.djvu/460

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ode de Klopstock, et, quand nous nous retrouvions dans la lueur crépusculaire, nous faisions retentir la louange sincère de l’auteur de nos plaisirs.

« Et ne doit-il pas être immortel, celui qui nous a trouvé la santé avec des jouissances que le cheval ne donna jamais dans sa course hardie, et que la balle même n’offre pas ? »

Telle est la reconnaissance que s’assure un homme qui sait ennoblir et populariser dignement, par l’impulsion de l’esprit, un acte terrestre. Et comme des enfants bien doués, dont les facultés intellectuelles sont de bonne heure merveilleusement développées, reviennent, dès qu’ils l’osent, aux plus simples jeux de leur âge, nous n’oubliions que trop aisément que nous étions appelés à des choses plus sérieuses ; toutefois ce mouvement, souvent solitaire, ce doux balancement dans le vague, réveillait en foule mes besoins intimes, qui avaient sommeillé quelque temps, et j’ai dû à ces heures le développement plus rapide d’anciens projets.

Les siècles ténébreux de l’histoire d’Allemagne avaient dès longtemps occupé ma curiosité et mon imagination. L’idée de dramatiser Goetz de Berlichingen au milieu de son époque avait pour moi infiniment de charmes et d’intérêt. Je lus soigneusement les principaux écrivains ; l’ouvrage de Datt de Pace publica fixa toute mon attention ; je l’avais étudié assidûment et m’étais représenté de mon mieux ces singulières particularités. Ces travaux, poursuivis dans un but moral et poétique, je pouvais encore en tirer un autre parti, et, comme je me disposais à visiter Wetzlar, j’étais historiquement assez préparé ; car la Chambre impériale avait pris naissance à la suite de la paix publique, et l’histoire de ce tribunal pouvait être un précieux fil conducteur à travers le labyrinthe de l’histoire d’Allemagne. L’organisation des tribunaux et des armées donne, après tout, l’idée la plus juste de l’organisation d’un État. Les finances mêmes, dont on regarde l’influence comme si importante, méritent beaucoup moins d’attention : car, si la fortune publique est insuffisante, on n’a qu’à prendre à l’individu ce qu’il a péniblement amassé et recueilli, et, comme cela, l’État est toujours assez riche.


Ce qui m’arriva à Wetzlar n’est pas d’une grande importance, mais on y trouvera peut-être un plus haut intérêt, si l’on ne dédaigne pas de