Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome X.djvu/316

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mes que c’était l’abbé Grégoire. Je désirais fort m’approcher de lui et lier connaissance ; mais mon ami, qui n’aimait pas les Français, ne voulut pas y consentir, et nous nous bornâmes à observer, d’une certaine dislance, ses manières, et à prêter l’oreille à ses jugements, qu’il exprimait à haute voix.

Nous poursuivîmes notre voyage,, et, passant du bassin de l’Elbe dans celui du Weser, nous arrivâmes à Helmstaedt. Cette ville est dans une situation charmante. Si l’on n’arrive pas avec l’idée d’une université allemande, on est agréablement surpris de trouver dans, une pareille situation un ancien et modeste établissement scolaire, où, sur la base d’une vie claustrale antérieure, furent établies des chaires d’un nouveau genre ; où de bons bénéfices offrent une position aisée ; où d’anciens et vastes édifices fournissent une place suffisante à un établissement convenable, à d’importantes bibliothèques, à des cabinets considérables ; enfin, où une activité tranquille peut d’autant mieux se livrer à des travaux littéraires assidus, que le petit nombre des étudiants n’exige pas cette ardeur d’enseignement, qui ne fait que nous étourdir dans les universités fréquentées.

Le personnel des maîtres était, de toute façon, considérable. Il me suffira de nommer Henke, Potf, Lichtenstein, Crell, Bruns et Bredow, et chacun pourra se faire l’idée du cercle dans lequel se trouvèrent les voyageurs. Un solide savoir, qui se communiquait volontiers, une société où la bonne humeur était entretenue par une jeunesse constamment renouvelée, un joyeux contentement d’esprit au milieu d’occupations sérieuses et sages : tout cela se combinait de la manière la plus heureuse, et il y faut ajouter l’influence des femmes : les plus âgées avec leur simplicité hospitalière, les jeunes dames avep leurs grâces, les jeunes filles tout aimables, enfin tout ce monde paraissant ne former qu’une seule famille. Les vastes appartements des habitations antiques permettaient les tables nombreuses et les grandes assemblées.

A la fin d’un beau souper, on avait projeté de nous offrir, à Wolf et à moi, deux couronnes élégamment tressées. Je remerciai par un baiser vivement rendu la belle jeune fille qui m’avait couronné, et j’eus le plaisir de lire dans ses yeux que je ne lui déplaisais pas sous cette parure. Le capricieux convive