Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome X.djvu/373

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l’essentiel de la vie, ils étaient gouvernés par des mots plus que par des idées et des intentions claires. Papadopoulos, qui venait souvent me voir à léna, me vantait un jour avec un juvénile enthousiasme l’enseignement de son professeur de philosophie. « C’est admirable, s’écriait-il, d’entendre cet homme excellent parler de Vertu, de Liberté et de Patrie. » Mais quand je demandai ce que cet excellent maître enseignait sur la Vertu, la Liberté, la Patrie, le jeune homme me répondit qu’il ne pouvait proprement pas le dire, mais que ces mots : Vertu, Liberté, Patrie, ne cessaient pas de retentir au fond de son âme.

C’est ce même Papadopoulos qui traduisit dans ce temps-là mon Iphigénie en grec moderne. Et dans cet idiome la pièce exprime merveilleusement la langueur d’un Grec voyageur ou exilé, car le regret général de la patrie s’y trouve exprimé d’une manière loute spéciale par le regret du pays de Grèce, le seul qui fût alors civilisé.

1818.

J’avais encore travaillé au Divan pendant l’hiver avec tant d’amour et de passion, que nous n’hésitâmes pas à commencer l’impression dès le mois de mars. Cependant les études continuèrent : je voulais tâcher de rendre cette poésie plus intelligible par des notes et des mémoires détaillés. Car il fallait s’attendre à voir les Allemands surpris, quand on essayerait de leur produire quelque chose d’un tout autre monde. Quelques pièces insérées dans VAlmnnach des dames avaient déconcerté le public plus qu’elles ne l’avaient préparé. On se demandait si c’étaient des traductions ou des imitaiions inspirées et appropriées, et ce doute ne fut pas favorable à l’entreprise. Je laissai l’affaire suivre son cours, ayant déjà l’habitude de voir le public allemand s’étonner avant d’accueillir et de jouir.

Avant tout, il me parut nécessaire d’éclaircir pour mes lecteurs et pour moi les caractères des sept principaux poètes persans et de leurs œuvres 1. Cela ne m’était possible que par une étude sérieuse et soulenue de l’imporlant travail de Hammer. Je ne négligeai aucun secours, ni la Religion des anciens Parsis


1. Tome I, pages t ? !J7 et suivantes.