Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome X.djvu/406

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d’amis, et il parvint à cette distinction, de voir une édition, une édition magnifique de ses œuvres complètes, soigneusement retouchées.

Mais, dans son automne, il devait ressentir encore l’influence de l’esprit du temps, et commencer d’une manière imprévue une nouvelle vie, une nouvelle jeunesse. Les bénédictions de la paix avaient longtemps régné sur l’Allemagne ; la sûreté et la tranquillité extérieures générales s’accordaient admirablement avec les sentiments intimes, humains, cosmopolites ; le paisible citadin semblait n’avoir plus besoin de ses murailles : on s’y dérobait, on aspirait à la campagne. La sécurité du propriétaire inspirait à chacun la confiance ; la libre vie naturelle attirait chacun, et l’homme né sociable, pouvant se bercer de la douce illusion qu’il mènerait dans la retraite une vie meilleure, plus commode, plus sereine, Wieland, qui avait déjà en partage le plus grand loisir littéraire, parut se chercher une demeure où régnerait une tranquillité plus favorable aux Muses. Et comme il eut l’occasion et le moyen d’acheter un domaine dans le voisinage de \Yeimar, il prit la résolution d’y passer le reste de sa vie. Ceux qui l’ont visité souvent, qui ont vécu ave’c lui, pourront nous raconter en détail de quelle manière il se montra dans cette retraite avec toute son amabilité, comme chef de maison et pure de famille, comme ami et comme époux, surtout parce qu’il pouvait bien s’éloigner des hommes, mais que les hommes ne pouvaient se passer de lui ; on nous dira avec quelle grûce il développa ses vertus sociales et hospitalières.

Je demanderai à de plus jeunes amis de nous retracer cette idylle, et je me borne à rappeler en peu de mots avec sympathie comment ce bonheur champêtre fut troublé par la mort, qui enleva d’abord à Wieland une fidèle amie, habitante de sa maison, puis la digne et soigneuse compagne de sa vie. Il dépose ces restes chéris dans son propre domaine, et, lorsqu’il prend le parti de renoncer au ménage champêtre, beaucoup trop compliqué pour lui, et de vendre la propriété dont il avait joui gaiement quelques années, il se réserve une place entre ses deux amies pour y trouver aussi son repos. Et c’est là que les honorables frères l’ont accompagné ou plutôt l’ont porté, accom-> plissant ainsi son touchant désir que les descendants puissent,