Page:Goethe - Œuvres, trad. Porchat, tome X.djvu/456

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mandé à Léonard le tableau de la Cène, Eugène résolut de faire revivre, autant que possible, dans un nouvel ouvrage celui que trois siècles avaient détruit ; mais, pour que le nouveau travail fût impérissable, il devait être exécuté en mosaïque.

Bossi est chargé de ce travail et il commence dès les premiers jours de mai 1807.11 juge convenable d’exécuter un carton de même grandeur. Il reprend les études de sa jeunesse et s’attache entièrement à Léonard ; il étudie ses œuvres et surtout ses écrits, parce qu’il est convaincu qu’un homme qui a produit de si excellents ouvrages doit avoir travaillé d’après les principes les mieux arrêtés et les meilleurs. Il avait calqué les têtes et quelques aulres parties de la copie de Ponte Capriasca, les têtes et les mains de la copie de Castellazzo et de celle de Blanchi. Il dessine ensuite tout ce qui reste de Léonard lui-même et aussi de quelques contemporains. Il se procure toutes les autres copies encore existantes, dont il apprend à connaître vingt-sept de près ou de loin ; des dessins et des manuscrits de Vinci lui sont obligeamment communiqués de toutes parts.

Dans la composition de son carton, il s’attache surtout à la copie Ambrosienne : c’est la seule qui soit aussi grande que l’oliginal. Bianchi avait cherché, au moyen de fils croisés et de papier transparent, à donner une imitation très-exacte, et il avait travaillé incessamment en présence de l’original, qui, déjà très-endommagé, n’était pourtant pas encore repeint.

A la tin d’octobre 1807, le carton est achevé ; une toile d’une seule pièce et de même grandeur est tendue, et tout l’Ensemble aussitôt dessiné dessus. Alors, aù’n de régler un peu ses teintes, Bossi peignit le peu de ciel et de paysage qui, à cause de la situation élevée et de la pureté des couleurs, était resté frais et brillant dans l’original. Ensuite il ébauche les têtes de Christ et des trois apôtres à sa gauche. Pour ce qui regarde les vêtements, il commence par peindre ceux dont il a pu constater plus tôt les couleurs, afin de choisir ensuite les autres d’après les principes du maître et d’après son goût personnel. C’est ainsi qu’il parvint à couvrir toute la toile, dirigé par une méditation attentive, donnant à ses couleurs des tons élevés et vigoureux.

Malheureusement l’humidité de ce lieu inhabité lui fit contracter une maladie, qui le força de suspendre ses travaux ; mais il