dans lequel ils buvaient à leur santé, est barbare sans doute, mais le sentiment sur lequel il est fondé est juste ; car c’est un culte d’admiration rendu à un beau pied.
Entre deux amis intimes qui parlent d’une femme aimée, la conversation ne se borne pas longtemps à faire l’éloge de son pied. Les charmes de Charlotte, à l’époque ou Édouard n’était encore que son amant, furent vantés et décrits avec exaltation, puis on parla des difficultés que le Baron était obligé de surmonter pour obtenir un instant d’entretien avec sa bien-aimée.
— Te souvient-il encore, dit le Comte, de l’aventure où je te secondai d’une manière bien désintéressée, ma foi ? Nous venions d’arriver dans le vieux château où notre souverain s’était rendu avec toute la cour pour y recevoir la visite de son oncle. La journée s’était passée en cérémonies et en représentations ennuyeuses. Il ne t’avait pas été possible de t’entretenir avec Charlotte ; une heure de douce causerie pendant la nuit devait vous dédommager de cette privation.
— Oui, oui, répondit Édouard, et tu connaissais si bien les sombres détours par lesquels on arrivait aux appartements des filles d’honneur, que je te choisis pour guide. Tu ne te fis pas prier, et nous arrivâmes sans accident chez ma belle…
— Qui, songeant beaucoup plus aux convenances qu’à mon plaisir, avait garde près d’elle la plus laide des ses amies. Certes, ma position était fort triste tandis que vous étiez si heureux, vous autres.
— Notre retour aurait pu me faire expier ce bonheur. Nous nous trompâmes de route, et quelle ne fut pas notre surprise, lorsqu’en ouvrant une porte, la seule de la galerie où nous nous étions égarés,