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Page:Goethe - Les Affinités électives, Charpentier, 1844.djvu/181

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par ce que tu m’en diras, je verrai ensuite avec mes propres yeux.

Ottilie, qui savait que sa tante évitait avec soin tout ce qui pouvait l’impressionner ou la surprendre, partit aussitôt et se détourna plusieurs fois dans l’espoir de voir l’Architecte, mais il ne parut point. L’église qui était achevée depuis longtemps n’avait rien de neuf à lui offrir ; elle s’avança donc vers la porte de la chapelle, qui, quoique surchargée d’airain, s’ouvrit sans effort ; et l’aspect de ce lieu, qu’elle croyait connaître parfaitement, lui causa un étonnement mêlé d’admiration : a travers la haute et unique fenêtre qui l’éclairait, tombait un jour grave et bizarrement nuancé ; les vitraux étaient peints, ce qui donnait à l’ensemble un ton étrange, et disposait l’âme à des impressions mélancoliques. Les pavés cassés avaient été remplacés par des briques de forme différente, et unies entre elles par une couche de plâtre, de manière à former des dessins allégoriques. Ce double ornement, que l’Architecte avait fait préparer et exécuter en secret, rehaussait la beauté des peintures. Les stalles antiques savamment sculptées, qu’on avait trouvées parmi les bois et les meubles qui encombraient cette chapelle, étaient symétriquement rangées contre la muraille et offraient de solennels lieux de repos.

Ottilie contemplait avec plaisir ces détails connus, qui se présentaient devant elle comme un tout inconnu ; elle fut s’asseoir dans une des stalles, et ses regards errèrent autour d’elle sans se fixer sur aucun objet ; il lui semblait qu’elle était et qu’elle n’était point ; qu’elle sentait et qu’elle ne sentait point ; que tout disparaissait devant elle, et qu’elle disparaissait devant tout.

Lorsque le soleil, qui avait fait briller les vitraux peints