Page:Goethe - Les Affinités électives, Charpentier, 1844.djvu/51

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— Puisque nous ne pouvons pas encore voir tout cela s’opérer sous nos yeux, s’écria Édouard, tâchons, en attendant, de tirer de cette charmante formule un enseignement utile et applicable à notre position. Il est évident, ma chère Charlotte, que tu es _A_ et que je suis _B_, dépendant de toi, et très-irrévocablement attaché à ta suite. Le Capitaine représente le méchant _C_ qui m’attire assez puissamment pour nous éloigner, sous certains rapports, bien entendu. Il est donc très-juste de te procurer un _D_ qui t’empêche de te perdre dans le vague, et ce _D_ indispensable, c’est la pauvre petite Ottilie que tu es dans la nécessité d’appeler enfin auprès de toi.

— Ta parabole ne me paraît pas entièrement exacte, répondit Charlotte ; mais je n’en sais pas moins très-bon gré à tes _affinités électives_, puisqu’elles ont amené entre nous une explication que je redoutais. Oui, je te l’avoue, depuis ce matin je suis décidée à faire venir Ottilie au château. Ma femme de charge m’a annoncé qu’elle allait se marier et par conséquent me quitter, voilà ce qui justifie ma résolution sous le rapport de mon intérêt personnel. Quant à l’intérêt d’Ottilie, tu vas en juger par ces papiers que je te prie de lire tout haut. Je te promets de ne pas y jeter les yeux pendant que tu les liras, mais je dois t’avertir que j’en connais le contenu.

A ces mots elle remit à son mari les deux lettres suivantes :