pour nous mettre en harmonie avec l’univers et avec nous-même ?
Le séjour d’Ottilie au château y amena plus d’un changement favorable pour tous. Les deux amis ne se faisaient plus attendre pour les heures des repas ou des promenades ; ils se montraient, surtout, beaucoup moins empressés à quitter la table, et ne parlaient jamais que de choses qui pouvaient intéresser ou amuser la jeune fille. Ce désir de lui être agréable se révélait aussi dans le choix des lectures qu’ils faisaient à haute voix ; ils poussaient même l’attention jusqu’à suspendre ces lectures, dès qu’elle s’éloignait, et ils ne les reprenaient que lorsqu’elle rentrait au salon.
Ce changement n’avait point échappé à Charlotte : aussi désirait-elle savoir lequel des deux hommes l’avait principalement amené, et se mit-elle à les observer avec une attention scrupuleuse ; mais elle ne découvrit rien, sinon que tous deux étaient devenus plus sociables, plus doux et plus communicatifs.
Ottilie avait appris à connaître les habitudes et même les manies et les caprices de chacune des personnes au milieu desquelles elle vivait. Devinant mieux qu’elles-mêmes ce qui pouvait leur être agréable, elle accomplissait leurs souhaits sans leur donner le temps de les exprimer ; un mot, un geste, un regard suffisait pour la guider. Cette persévérance active resta cependant toujours calme et tranquille. Le service le plus régulier se faisait par ses ordres, et souvent par elle-même, sans aucune apparence d’empressement ou d’inquiétude. Sa démarche était si légère, qu’on ne l’entendait ni s’en aller, ni revenir ; et ses allures, quoique toujours paisibles, étaient si gracieuses, que nos amis se sentaient heureux en la voyant se mouvoir sans