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Page:Goethe - Werther, 1845, trad. Leroux.djvu/91

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Nos jeunes gens avaient arrangé un bal à la campagne, je consentis à être de la partie. J’offris la main à une jeune personne de cette ville, douce, jolie, mais du reste assez insignifiante. Il fut réglé que je conduirais ma danseuse et sa cousine en voiture au lieu de la réunion, et que nous prendrions en chemin Charlotte S… « Vous allez voir une bien jolie personne, » me dit ma compagne quand nous traversions la longue forêt éclaircie qui conduit au pavillon de chasse. « Prenez garde de devenir amoureux ! ajouta la cousine. — Pourquoi donc ? — Elle est déjà promise à un galant homme que la mort de son père a obligé de s’absenter pour ses affaires, et qui est allé solliciter un emploi important. » J’appris ces détails avec assez d’indifférence.

Le soleil allait bientôt se cacher derrière les collines, quand notre voiture s’arrêta devant la porte de la cour. L’air était lourd ; les dames témoignèrent leur crainte d’un orage que semblaient annoncer les nuages grisâtres et sombres amoncelés sur nos tètes. Je dissipai leur inquiétude en affectant une grande connaissance du temps, quoique je commençasse moi-même à me douter que la fête serait troublée.

J’avais mis pied à terre : une servante qui parut à la porte nous pria d’attendre un instant mademoiselle Charlotte, qui allait descendre. Je traversai la cour pour m’approcher de cette jolie maison ; je montai l’escalier, et en entrant dans la première chambre j’eus le plus ravissant